Dans la jungle impitoyable des jeux vidéos, Capcom régnait en maître sur le survival-horror grâce à sa série phare, Resident Evil, à peine dérangé par son concurrent le plus sérieux, le sublime et dérangeant Silent Hill de Konami. Oui mais voilà, à force de répéter inlassablement les mêmes recettes, Capcom a fini par nous gaver un tantinet… Même s’il faut bien admettre que Code Veronica distillait en son sein de grands moments d’angoisse concentrationnaire.

Puis vint Squaresoft, jusque-là éditeur leader de sushi-RPG. Difficile de se défaire de ses vieilles habitudes : Parasite Eve (PE), premier du nom était un jeu bâtard, à mi-chemin entre le jeu de rôle et le survival pur-sang. Le jeu n’eut même pas l’honneur de sortir officiellement en Europe.
L’affaire aurait pu s’arrêter là, mais on n’abandonne pas une licence avec un tel potentiel aussi rapidement. Voilà donc PEII, suite re-liftée et recentrée sur l’aspect survival, dans laquelle les caractéristiques RPG ont été réduites à leur plus simple appareil. La pulpeuse blondasse Aya Brea reprend donc du service comme chasseuse de NMC, créatures difformes dont l’ADN a été salement amoché par les parasites du titre, les « neo-mitochondries ». Entre-temps, la bimbo-with-a-brain est passée de la côte Est (Manhattan) à la côte Ouest (le désert Mojave) où les NMC s’amusent à dévorer les rares habitants d’un bled paumé au cœur de nulle part… Aya, elle-même « parasitée », sera amenée à faire bon usage de ses pouvoirs surnaturels pour découvrir ce qui se trame vraiment derrière ce nouvel incident mitochondrial.

Disons-le tout net, malgré une première partie un peu laborieuse dans un centre commercial angelenien dévasté, ce second épisode de PE est une totale réussite. Beaucoup moins bancal que son prédécesseur, PEII renifle furieusement la capcomerie new age. Même design à base de décors précalculés et de personnages polygonés. Même jouabilité engoncée -le célèbre dogme du « balai dans le cul » inhérent à tous les jeux du genre. Finalement, la différence notable de PEII, c’est son système d’évolution du personnage. Après chaque combat, vous gagnez des points d’expérience, des Bounty Points (la monnaie bizarroïde d’usage), et des MP (points de magie). Toutes les autres caractéristiques peuvent être augmentées grâce à votre équipement. Ces petites innovations peuvent de prime abord paraître un peu insignifiantes, mais ce système amène de profondes modifications dans la manière d’aborder un survival. Ici, pas question d’éviter l’affrontement pour « survivre », fuir le combat est automatiquement pénalisé. C’est en fait le seul moyen d’avoir un personnage suffisamment puissant pour tenir le coup face aux attaques incessantes des NMC. La gestion des munitions devient donc un problème secondaire. A vrai dire, on n’en manque jamais vraiment. Exit donc la frustration de devoir recommencer le jeu depuis le début à cause d’une mauvaise gestion. Contrairement aux derniers RE, qui s’adressaient de plus en plus aux core-gamers, la difficulté de PEII est évolutive et très bien dosée, sans pour autant tomber dans le genre survival pour les nuls.

Malgré tout, PEII n’évite pas certains écueils. Certes, le savoir-faire indéniable de Square en matière de scénario et de cinématiques est particulièrement bien exploité. On n’oubliera pas de sitôt la désormais culte « scène de la douche » d’Aya -dans un motel isolé, ça vous rappelle quelque chose ? Par contre, l’habillage sonore, habituel parent pauvre des productions Square, ne fait pas vraiment honneur au jeu. Aucun dialogue parlé, très peu de musique d’ambiance. Une absence acceptable pour un RPG, mais difficilement supportable pour un survival.
Mais plus que tout, PEII n’effraie pas vraiment le joueur. On est loin du malaise induit par les décors déliquescents de Silent Hill et le camp de « rééducation » de Code Veronica. D’un côté, on prend peut-être un peu plus de plaisir à avancer. De l’autre, on arrive très vite au bout de l’aventure, après 6-7 heures de jeu. Et encore… en prenant son temps.

PEII ne révolutionne donc pas encore tout à fait le survival, ses qualités ne parvenant pas à faire totalement oublier ses défauts. Mais il est suffisamment rafraîchissant et prometteur pour nous laisser entrevoir un avenir plus radieux pour un genre qui se mord la queue. Le salut du survival passera-t-il par Squaresoft ? C’est fort probable…