SmileBit (studio de développement made in Sega) semble abonné sinon aux jeux décalés du moins à ceux qui ne provoquent pas un consensus généralisé. Jet set radio, rappelez-vous, c’est eux. Un succès d’estime pas vraiment confirmé au niveau des ventes, une réussite esthétique incontestable dont le gameplay n’a malheureusement pas eu l’air d’attirer les foules. Et ça ne va sans doute pas s’arranger avec ce GunValkyrie, shoot nippon jusqu’au bout des ongles, fer de lance du jeu à la japonaise sur la grosse boîte-X américaine. Un jeu qui laisse indubitablement perplexe mais qui a au moins le mérite de poser -sans trop y répondre- deux ou trois questions pas dénuées d’intérêt : un jeu trop difficile reste-t-il un bon jeu ? Une jouabilité trop inhabituelle et complexe induit-elle forcément une erreur de game-design ?

Car GunValkyrie est un jeu inhumain, proprement inhumain. Dans ce sens qu’on se pose la question de savoir comment on pourrait en maîtriser les principes de base sans recourir à l’introduction d’implants bioniques dans ses propres phalanges. Tellement ardu qu’on se demande si on peut le conseiller à monsieur tout-le-monde… Ce n’est pas tant la maniabilité FPS qui fait défaut ici, plutôt inhabituel dans les jeux à la sauce nippone, et toujours un peu long à prendre en main, mais depuis Halo on sait qu’on finit toujours par prendre le pli. Non, l’aspect le plus controversé de ce Starship troopers hallucinogène où vous allez bouffer de l’insectoïde gigantesque et carnassier, se concentre exclusivement sur la technique dite du « boost ». Une technique qui fait parler d’elle tant elle semble difficile à maîtriser et dangereuse pour la survie du joypad. Le personnage qu’on incarne est en effet équipé d’un jetpack qui lui permet de se maintenir quelques courtes secondes en l’air, ce qui n’est malheureusement pas suffisant lorsque le sol grouille d’insectes vindicatifs. Pour rester hors du plancher des vaches le plus longtemps possible, il faut donc utiliser un combo de « boosts » qui se déclenche en effectuant une légère pression lorsqu’on dirige le stick analogique de déplacement. Ca n’a l’air de rien sur le papier, mais on frôlerait presque l’idée révolutionnaire : GunValkyrie base son gameplay sur une fonction du stick analogique rarement utilisée si ce n’est pour klaxonner dans les jeux de bagnoles. Et dans le feu de l’action, on comprend pourquoi : ça fait mal au pouce, c’est particulièrement difficile à doser et surtout ça donne l’impression que la manette ne va pas tenir longtemps le choc. Lorsqu’en pleine bataille, il faut rester en l’air, booster dans tous les sens, bouger son centre de visée et tirer, le tout en même temps, on se demande si l' »innovation » de SmileBit n’aurait pas du rester confinée dans le cahier des charges.

D’autant plus regrettable que GunValkyrie est en dehors de ça un shoot remarquable, et magnifique si l’on adhère à l’esthétique rose bonbon et jaune fluo des niveaux qui composent la planète grouillant d’insectoïdes. Même s’il met nos nerfs et nos doigts à rude épreuve, on ne peut s’empêcher d’avoir une certaine affection pour ce jeu qui sort des sentiers battus… Certes il faut avoir la pugnacité d’un hardcore gamer pour achever GunValkyrie et nombreux sont ceux qui vont le lui reprocher. Et le choix de SmileBit ne provoquera sans doute pas l’unanimité sinon auprès des musclés du joypad. Mais peut-être faut-il finalement ne considérer ce jeu que comme un brouillon… Un avant-goût du futur Panzer dragoon orta, nouvel épisode de la célèbre saga Saturn (aperçu au dernier E3) développé par le même studio et qui s’annonce comme terriblement prometteur. Peut-être l’occasion pour SmileBit de rattrapper cette semi-occasion manquée que représente GunValkyrie