Sympathique trajectoire que celle de Matthew Vaughn, émergé de la vague britannique du polar frimeur (Guy Ritchie, Danny Boyle, Paul McGuigan) pour se reconvertir ensuite dans l’entertainment juvénile et canaille, directement influencé par la bande-dessinée (depuis Kick Ass, tous ses films sont des adaptations de comics). D’un film à l’autre, s’affirment les contours d’un cinéma sans génie mais sans complexe : un cinéma fait de jeunesse, de légèreté, d’insolence, où des audacieux encore pubères sont catapultés tête la première dans des aventures trop grandes pour eux.

De là, un style volontiers péchu et désinhibé, qui rechigne à tout esprit de sérieux pour s’enivrer de péripéties sans queue ni tête, de morceaux de bravoure affranchis de la gravité et de la cohérence, que viennent éclabousser des gerbes de violence graphique aussi innocentes que des bulles de savon. À la fois hommage et pied-de-nez à la série des James Bond, la série des Kingsman est à ce titre emblématique : loin des prétentions réalistes et psychologisantes des derniers 007 (dont l’épisode dépressif commence clairement à lasser), cette nouvelle franchise d’espionnage semble avoir été pensée et illustrée par un gamin de douze ans.

Dans ces nouvelles aventures, on retrouve ainsi Eggsy, petite frappe londonienne devenue du jour au lendemain espion de classe A. Lancé sur les traces d’une narcotrafiquante prête à tout pour légaliser son business, ce baby Bond se doit de multiplier les voyages à travers le monde et les coups d’éclats, tout en gérant à distance ses problèmes de couple avec une princesse scandinave. Deuxième épisode oblige, le film conjure l’absence d’effet de surprise par une surenchère perpétuelle, élargissant son terrain de jeu (la collaboration avec une team d’espions en santiags emmenée par Jeff Bridges) tout en réactivant frénétiquement les mêmes leviers – humour sucré-salé, générosité high tech, algarades de cartoon, où se frictionnent parapluies bullet proof et lassos électriques.

Si l’on continue d’apprécier l’état d’esprit et l’équilibre de l’ensemble (le film est plein à craquer, et pourtant léger comme une plume), on regrette aussi une forme de systématisme, sensible dans ces scènes d’action invariablement filmées en plans séquence numérisés, ou dans ces quelques private jokes superflues que le film déroule sans inspiration (dans son propre rôle, Elton John est au mieux embarrassant). On est donc loin de la copie parfaite, et le réalisateur, déjà concentré sur le troisième volet, aura fort à faire pour éviter l’épuisement de son filon.

Reste, pour l’heure, une franchise qui parvient à osciller agréablement entre le serial débridé et la satire politique mordante (ici, le bras de fer entre la marraine mégalo et le président américain offre un écho délicieux au duel de guignols entre Kim Jong-un et Donald Trump) et préserve malgré ses redites sa belle euphorie de cancre en costard. À défaut de faire de Kingsman un premier de la classe, ce plaisir simple et pétillant rappelle combien l’espionnage est bien plus qu’un métier à risques : un rêve d’enfant, tout en montres explosives et sauvetages du monde sur le fil.

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