Evidemment, on y a droit. Les Smashing Pumpkins n’avait pourtant pas fait grand chose dans les règles depuis le début de leur carrière : un album très seventies en 1991, un double album magnifiquement indigeste en 1995, un disque new wave-indus ou quelque chose comme ça en 1998, une B.O. de David Lynch (Lost highway) et un album entier téléchargeable gratuitement sur le net fin 2000 … Mais voilà, les lois commerciales sont et restent les plus fortes. Les Pumpkins, si droits et dignes de nature, nous sortent quand même leur Greatest hits, avec au moins la pudeur et la lucidité de le sous-titrer Rotten apples. Parmi tout ce consensus vient tout de même se glisser une bonne nouvelle, et pas des moindres, ce « best of » des Smashing Pumpkins est l’exemple même de ce genre d’exercice très réussi. On a là à faire à un double CD d’une qualité rare. Découpé de manière chronologique -et finalement ce n’est pas si bête-, ce Greatest hits : Rotten apples nous rappelle ce que fut le groupe de Chicago. A savoir un groupe intelligent et à l’ascension assez progressive, digne de respect. Le premier disque retrace donc la période qui va de Gish (1991) à Machina : The Machines of God (2001) avec tout ce que cela comporte de grands morceaux (Cherub rock, Today, Disarm, 1979, Everlasting gaze). Rien de particulier sur ce premier CD, il se contente (et que pourrait-il faire d’autre ?) de balancer les hymnes rock qui constituèrent la popularité du groupe, à noter tout de même l’absence incompréhensible de I am one, single paru en 1991 qui avait véritablement lancé le groupe. Mystère …

Le deuxième disque (disponible uniquement en édition limitée et sous titré Judas O) recèle lui quelques surprises, d’ailleurs quasiment toutes bonnes. Il s’agit en effet de morceaux qui furent les faces B des singles du groupe, toujours répertoriés de manière chronologique et dévoilant une face plus sombre et moins connue des Smashing Pumpkins. Comment définir et prénommer cette « face sombre »? On sait que Billy Corgan ne voulait plus faire de rock, qu’il ne voulait pas « tomber » dans la musique électronique et que le jazz ou la soul ne sont pas spécialement sa tasse de thé … On sait aussi que Corgan voulait inventer un nouveau genre musical, et bien on trouve une once de ce projet ambitieux à l’intérieur de cette deuxième partie de Greatest hits, partie qui n’a d’ailleurs rien d’un greatest hits puisque les chansons sont quasiment toutes inconnues du public moyen. Ca donne des morceaux assez expérimentaux, entre pop folk et ambiance Lynchienne charpentée de sons électroniques qui rappelle le rock indus …bref, on se gardera d’étiqueter vainement ce deuxième CD tant tout ceci s’avère complexe et mérite réellement d’être écouté… On y trouve aussi des chansons plus conventionnelles et absolument magnifiques : My mistake pour ne citer que celle-ci. La pochette en noir et blanc arbore une photo du groupe qui doit dater d’environ 1990-1991… apparemment les Smashing Pumpkins ne se sont pas remis de leur passé. Billy Corgan parviendra-t-il à construire son avenir en solo ? On lui fait confiance, presque aveuglément.