Suite des aventures du Cube, l’étrange quadrilatère sonore mené par le saxophoniste Alban Darche, sous les nouveaux habits du label nantais Yolk ( » jaune d’œuf « , en anglais), taillés sur mesure par le graphiste Jean Depagne : cette fois-ci, le groupe a bien six faces, les quatre musiciens (Darche, donc, le bassiste Sébastien Boisseau, le claviériste Arnaud Roulin et le batteur Christophe Lavergne) étant rejoints par la guitare de Gilles Coronado et les saxophones de Patrick Charnois. On se souvient des assemblages surprenants et ludiques du premier disque du Cube, qui jouait la carte du gag et du décalage en mêlant une ambiance cartoon à des architectures solides influencées par les défricheurs américains du M-Base ou en convoquant des synthétiseurs très « chapi-chapo » dans leur jazz au groove par ailleurs impeccable. Autant dire qu’on imagine plus volontiers ces trublions géométriques dans la cabine du Dj d’un bar surréaliste que dans l’ambiance feutrée d’un salon anglais où l’on prendrait le Thé, mais ils nous ont habitués à ce que rien ne soit tout à fait normal.

On se laissera donc basculer dans leur cage d’ascenseur avec d’autant plus de plaisir qu’elle évolue sans vraiment changer (autrement dit qu’elle reste la même tout en évoluant) ; les compositions, toutes signées Alban Darche et toujours affublées de titres à coucher dehors (C’Baff, La Fête du travail, Chanson au carré, Le Pr. Roulin pète un boulon), gardent leur côté joyeusement acrobatique et référentiel, recourant sans cesse aux codes ou aux clichés pour mieux les corrompre ensuite. Si les synthétiseurs cheap d’Arnaud Roulin se font cette fois-ci plus discrets et n’occupent plus l’avant-plan avec la même insistance, ils n’en restent pas moins l’un des ingrédients essentiels d’un cocktail qui sait, à l’occasion, taire sa folie et rentrer dans le moule d’un jazz plus straight mais non moins efficace (Papa tango Stephi). Les gadgets, drôles d’idées et autres tentations non-conventionnelles qui font la personnalité du Cube, qu’on se rassure, restent bien présents, même si ce deuxième opus semble le voir s’assagir un peu par rapport au premier. Ce qui ne veut pas tout à fait dire qu’il soit devenu « sage », on s’en doute.