C’est un fait, et il faudra bien donner raison aux journaux anglo-saxons qui ne cessent d’écrire à son propos : la Scandinavie abrite pour l’heure le meilleur de la pop, et ça n’est que peu le fait du hasard. Elle est souvent, dans ce coin reculé de la géographie musicale, affaire de fantasme, et loin de déroger à la tradition, Annie cultive depuis l’enfance une belle obsession pour les icônes eurobeat et italo-disco (Stacey Q, Valerie Dore). Sauf que là où les Sally Shapiro et modestes consorts s’arrêtent au pas de la chambre quant à l’exprimer, Annie n’a jamais caché ses ambitions mainstream.

Pour l’heure, le sort lui a été assez triste (succès tardif de son Greatest Hit après décès de son producteur et conjoint Erot, rendez-vous manqué avec les charts quand paraît le superbe Anniemal), jamais la faute aux refrains, terrain sur lequel Annie domine sans partage depuis presque dix ans (Chewing-gum, Heartbeat). Son deuxième album, Don’t stop, devait la consacrer en 2008 au niveau de ses homologues anglo-saxons et rendre enfin justice à la Norvège dans les hit-parades ; mais c’était sans compter sur le soutien précaire de sa première signature sur major (chez Island Records) qui la largue en pleine course, un disque à moitié raté sur les bras – le cartel de producteurs anglais Xenomania ruinant presque systématiquement son travail d’écriture avec une pop-rock 90’s tout juste bonne à décongeler (Bad times, Heaven and hell). C’est avec l’âme en peine, du coup, qu’on retrouve sur Smalltown Supersound un album en lambeaux et une Annie qui, compte tenu d’une distribution plus modeste et d’un timing à contretemps des Little Boots et La Roux, n’aura jamais le crédit qu’elle mérite. D’autant plus dommage qu’au milieu du fracas, restent quelques beaux moments d’étrange qu’il nous aurait plu d’imaginer dans les gros clubs ou en fond sonore des McDonald’s : les boucles techno d’un Paul Epworth à contre-emploi (Hey Annie, I don’t like your band), et surtout ces séquences de rêve alignées par Richard X, de l’odyssée eurodisco (Songs remind me of you) aux nuages de synthèse d’Anthonio. C’est tout ce qu’il nous reste de l’album de l’année mais on prend, parce que l’hiver le justifie : rien ne nous réchauffera autant quand viendra l’heure de danser.