« Où veux-tu aller ? -N’importe où- A quelle vitesse tu veux y arriver ? » Voilà en quelques mots le parcours de Marjorie, speed queen de cette quête dont on imagine dès les premières lignes qu’elle finira mal.
Road movie moderne, le roman de Stewart O’Nan rassemble en moins de trois cents pages à peu près tout ce que notre époque véhicule de peur, d’angoisses et de violence (visible ou indicible). Accusée et condamnée à la peine capitale pour une série de meurtres perpétrés avec ses comparses lors d’une virée sur la route 66, elle livre ses confessions à Stephen King, en espérant qu’il en tirera un best-seller. Le moyen d’accéder à une notoriété post-mortem ? Sans doute, aux vues de l’état d’une société bientôt capable d’accorder, via ses médias, à chacun son quart d’heure de célébrité.
Enfant sinistrée d’une Amérique profonde où se confondent rêve et réalité, Marjorie n’aura de cesse de convoquer à sa rescousse les images d’une mythologie (le glossaire consacré aux voitures à la fin de l’ouvrage en fait foi) hasardeuse. Le fameux « rêve américain », drogue suprême de cette nation qui ne fut jamais innocente. A ce titre, la traduction de Philippe Garnier restitue à merveille l’univers de ce roman où les personnages s’apparentent à des héros de bande dessinée. God save America ?