A l’époque, l’annonce fit l’effet d’une bombe : Bill Berry (batteur) quitte le groupe. Après dix-huit ans de services au sein de cette formation que l’on croyait indestructible, un coup d’arrêt était porté à l’aventure. C’était il y a un an. Et plus grand monde ne misait sur R. E. M., dont les deux derniers albums en date (Monster et New adventures in hi-fi) avaient laissé une impression d’inachevé, de manque de profondeur.
C’est donc d’une manière quelque peu inattendue que Up renoue avec la vitalité et l’inspiration qui marquèrent leurs productions d’avant 94, ouvrant même de nouveaux horizons à Michael Stipe (chanteur) et à ses deux acolytes, Peter Buck (guitariste) et Mike Mills (bassiste), accompagnés dorénavant par une boîte à rythme.
Dès le départ, le ton est donné : la voix de Stipe entonne un chant délicat sur Airportman. Morceau à la fois sombre et féerique, immédiatement suivi par Lotus avec son orgue piquée à Neil Young. Et déjà un sommet. Le reste est à l’avenant : symphonies électroniques, touches baroques, orchestre déployant des cordes luxuriantes, phrasé de Michael Stipe retrouvant la puissance émotionnelle du chef-d’œuvre Automatic for the people. La force de Up réside essentiellement dans la diversité et l’étoffe de ces sonorités (la production aérée de leur nouveau producteur Pat McCarthy n’y est pas étrangère) et le jeu de guitare extrêmement sobre de Buck, procédant par touches impressionnistes, comme s’il avait redécouvert tout le potentiel de son instrument. L’intro au piano et les chœurs enjoués de At my most beautiful, titre que l’on croirait tout droit issu d’une session du Pet sounds des Beach Boys, constituant une autre prouesse pour un album jouant de bout en bout sur des climats en clairs-obscurs. Et se concluant par ces mots : « I’m free. Free ». Que dire de plus ? R. E. M. a su retrouver une liberté que peu de groupes possédant une telle notoriété savent exercer. L’aventure se prolonge…