Dans un tunnel, une voiture roule. A l’extérieur, le bruit du vent s’amplifie. Fondu au blanc. Quand le réel réapparaît, il est enfoui sous la brume épaisse qui recouvre les montagnes. Derrière surgit, comme dans un songe, le visage de Massoud. D’un battement de cils, ce plan d’introduction suggère toute la force de ce personnage de légende. Massoud l’Afghan retrace sous la forme d’une chronique de voyage, le dernier séjour de Christophe de Ponfilly en Afghanistan, lors de l’été 97. Ayant réalisé dans le cadre de son agence de presse Interscoop une trentaine de documentaires, Christophe de Ponfilly est resté à jamais marqué par son premier film, tourné il y a une vingtaine d’années dans un Afghanistan qu’il découvrait pour la première fois. Depuis, il n’a cessé d’y retourner pour tourner, encore et encore. Passant successivement de l’espoir de donner à Massoud (leader de la résistance aux forces soviétiques) une reconnaissance par la communauté internationale, au dégoût de son métier de journaliste : « Tenir une caméra a-t-il encore un sens ? Témoigner oui, mais pourquoi ? » dit-il en voix-off dans Massoud l’Afghan.

Dans les interstices de son dernier voyage, Christophe de Ponfilly nous communique toute son expérience de l’Afghanistan. Chaque lieu, chaque pierre, chaque rencontre est l’occasion de faire un retour en arrière sur l’histoire du pays et de ses combattants. Mais ici, pas d’images d’archives anonymes, mortes. Non, il s’agit d’une expérience partagée. L’histoire s’épaissit grâce au regard que le réalisateur porte sur Massoud et sur sa propre activité de journaliste. Conçu comme un ultime retour, ce film laisse le temps s’installer et les émotions nous submerger. Une autre richesse du film réside dans la sincérité dont le réalisateur fait preuve lors du montage. Il ne coupe pas les moments où le réel transperce le cadre trop réduit de la caméra, tous ces petits moments précieux où une main se tend vers le cadreur, où un fou rire gagne l’interprète pendant une interview… Ce sont eux qui rendent plus vivante, presque palpable, cette expérience que le réalisateur parvient à nous transmettre. Christophe de Ponfilly a déjà obtenu au cours de sa carrière de très nombreux prix. Avec Massoud l’Afghan, son talent est reconnu au niveau international puisqu’il vient d’obtenir le prix du meilleur documentaire au très prestigieux festival Dei Populi de Florence. Mais une autre récompense, non moins belle, est de voir son film programmé en salles et le visage de Massoud s’afficher sur les murs de Paris…