Les Trumans Water sont une bande de joyeux drilles déconneurs originaires de la côte Ouest des States. Ils ont eu leur petite heure de gloire il y a maintenant quelques années, avec deux albums remarquables distribués en Angleterre par Elemental, qui faisaient suite à un mini-buzz autour d’eux aux États-Unis après la sortie en forme de rafale de mitraillette de plusieurs albums et singles sur des labels divers mais connus pour leur bon goût (dont le toujours excellent et novateur Drunken Fish de Darren Mock). C’était le bon temps où le bruit régnait en maître sur la scène underground, où les guitares et le délire résistaient encore à la vague déferlante de l’electronica européenne. Depuis, le groupe s’est dissout -ou plutôt a changé tant de fois de line up et dans des intervalles si longs qu’on l’a cru mort- puis réformé, pour aujourd’hui revenir avec cet intéressant Fragments of a lucky break chez Trance Syndicate (le label d’un Butthole Surfers, autres frappés notoires).
Les influences sont toujours les mêmes -soit principalement Pere Ubu, Faust (dont ils reprirent naguère le Sad Skinhead) et surtout Captain Beefheart-, alliées à l’énergie de la musique punk et à la liberté du jazz. Cocktail détonnant ? Oui, mais pas de manière restrictive, puisque les Trumans Water donnent désormais l’impression de débrancher de temps en temps le pilote automatique du délire le plus total pour reprendre les rennes de leurs compos avec des morceaux plus fouillés et complexes -on n’ose pas dire posés (Wealth in a flask). Gagnant en maturité musicale au détriment, peut-être, d’une certaine forme de spontanéité, les Trumans Water sont de retour avec leur guitares qui refusent toujours farouchement de s’accorder, et ça fait plaisir. Cela n’en fait sans doute pas leur album le plus ébouriffant, mais comme ils semblent le dire malicieusement avec la cover de MX-80 Sound (groupe mythique de la scène punk-rock US de début des eighties), Someday you’ll be king !