Si « les gens sont bizarres », ainsi que l’ont chanté les Doors repris ici par Stina Nordenstam, elle-même n’échappe pas à l’observation. Remarquablement cantonnée à l’ombre alors que People are strange est tout de même son quatrième album (les deux premiers restant peu évidents à trouver ; peut-être auront-ils été réédités alors que vous lirez des lignes), Stina n’en continue pas moins à développer une musique toute en rugosité, apparemment roide, sur laquelle elle appose son chant entre miaulement et feulement.
Cette fois-ci, l’exercice est un peu particulier, puisque People are strange est principalement composé de reprises, pour la plupart prestigieuses : Tim Hardin, Leonard Cohen, Prince ou donc les Doors sont revisités par l’âme vagabonde de Stina Nordenstam. La Suédoise a également retravaillé des airs traditionnels (Lonesome road ou Like a swallow), et le plus étonnant, c’est qu’on croit à chaque fois entendre une composition originale. En particulier, Purple rain du nain de Minneapolis est à se damner. People are strange -par ailleurs sorti en single avec des mixes plein d’à propos de UNKLE et Techno Animal- est peut-être moins scotchant, mais tout aussi personnel (et pourtant, plus le titre est connu, plus l’appropriation est difficile).
Ce qui est particulièrement bluffant, c’est l’impression de modernité et d’intemporalité (oui, vous avez bien lu) qui se dégage des orchestrations des morceaux, sobres au possible, alors qu’un minimum de technologie est utilisé. Mais c’est une des marques de fabrique chez Stina Nordenstam, ceux qui ont jeté une oreille sur ses précédents opus le savent. On se croirait souvent dans un monde aquatique, notre perception de chaque titre se trouvant comme décalée, légèrement déformée (comme les photos présentes sur le disque au grain important et/ou floues). Et cette immersion est tout simplement délicieuse, propre à faire de People are srange un de nos disques de chevet. Stina Nordenstam le mérite amplement.