Atari a trouvé la recette miracle pour réussir un jeu vidéo adapté d’une licence : se foutre royalement du matériau d’origine. Le réduire à sa plus simple expression, le presser jusqu’à la moelle pour en retirer un prétexte minimaliste, trahir un peu s’il le faut, se débarrasser du superflu… Le reste est affaire de jeux vidéo. Les petits malins qui ont voulu adapter Transformers l’ont bien compris : prendre les commandes de gros joujoux transformables en voiturettes, c’est un peu ringard, surtout depuis que le jeu vidéo a délaissé les vertes prairies de l’enfance pour devenir un produit de masse soumis au dictat de la hype. Alors autant essayer d’en faire un bon jeu. S’acquitter du minimum de respect pour le décorum -on ne sait jamais, il reste peut-être des fans- et partir à la pêche aux influences. Interface techno-minimaliste inspirée des délires psychotropes de Rez et de l’esthétique cyber des productions de Hideo Kojima (Metal gear solid). Mise en scène faisant écho aux empoignades musclées et cohérentes de Halo, ses gros cargos dégueulant des hordes de warriors parfois kamikaze, parfois trouillards. Gameplay appliquant religieusement les préceptes de la méthode Metroid -avatars upgradables et possibilité de backtracking. Des références bien lourdes, bien marquées, qui auraient pu faire de Transformers un mini-moi vidéoludique aux ambitions trop grosses pour être honnêtes…

Contre toute attente, le jeu d’Atari démontre très rapidement qu’il a au contraire tout ce qu’il faut pour s’imposer comme un des shoots robotiques les plus impériaux qui soient depuis l’excellent Zone of the Enders 2. Moins auteuriste, moins personnel mais peut-être un peu plus maîtrisé et moins scripté, Transformers oppose aux graciles mechas du jeu de Kojima des robots lourdauds, patauds, mais incroyablement efficaces lorsqu’il s’agit de jouer les armes de destruction massives. Perdu au beau milieu de vastes étendues naturelles, forêts luxuriantes, montagnes enneigées, atolls paradisiaques, le joueur n’a dès lors plus qu’à se laisser prendre les tripes par le chaos guerrier. Des armées grouillantes de cyborgs aux boss cyclopéens se dégagerait presque une sorte de gigantisme quasi poétique lorsque le jeu nous met face à un robot-tanker de plusieurs centaines de mètres émergeant de la brume matinale. C’est trop gros pour être vrai et c’est justement ce qui permet à Transformers de dépasser le stade de petit jeu du dimanche auquel il semblait promis : un sens échevelé de la démesure qui sublime une licence moyennement engageante.