Objet d’un véritable culte chez les fans de la « SWAT Attitude » depuis ses débuts sur PC, Rainbow six a connu une évolution console chaotique dont les deux derniers épisodes (Lockdown et Critical Hour, inédit chez nous) ont failli sonner le glas. Après avoir ressuscité la série-soeur Ghost recon dans son itération next-gen avec le félin GRAW, Ubisoft a estimé qu’il était temps de pratiquer la même opération chirurgicale sur Rainbow six, longtemps prisonnier de sa structure très posée, qui bridait toute spontaneité dans le feu de l’action. Rainbow six : Vegas propulse donc le joueur au beau milieu d’une série d’opérations anti-terroristes, là où tous les éléments convergent vers un seul but : la réussite de la mission. Sans oublier les deux règles sacrées : veiller à la sécurité de son équipe (pas question de l’utiliser comme chair à canon) et à celle des otages (pas question d’en perdre ne serait-ce qu’un seul). Les phases de planifications des premiers opus ont disparu, le joueur est désormais dans l’obligation de se débrouiller on-site avec des infos partielles sur les objectifs en cours. Ce qui nécessite une grande faculté d’adaptation aux rebondissements qui ne manquent jamais d’arriver dans ce genre de situations à hauts risques, les décisions devant être prises dans un laps de temps très réduit.

Ici, pas de codec bavard monopolisé par un Colonel Campbell paternaliste. Vegas est une confrontation frontale avec la réalité : préparer un assaut en dix secondes alors que des otages hurlent dans la pièce voisine nécessite une sacrée dose de sang-froid et procure une montée d’adrénaline que même les meilleurs survival horror peinent à fournir. Devoir tenir compte de paramètres aussi nombreux (coéquipiers, otages, événements imprévus, tactiques d’assaut et / ou d’infiltration, etc.) dans un jeu d’action n’est pas aussi courant qu’on pourrait le croire et c’est justement dans cette mathématique complexe que réside la plus grande qualité de Vegas. Pour répondre aux contraintes qu’il impose, le jeu offre une maniabilité aux transitions FPS / TPS ultra-smooth, une interaction sophistiquée avec un environnement interactif dans ses plus grandes largeurs, qu’il s’agisse de construire de belles parties de hide & seek contre des terroristes retors et néanmoins kamikazes, de tirer profit d’une balistique à la précision chirurgicale ou de diriger ses deux acolytes au moyen d’un panel d’ordres tout ce qu’il y a de plus intuitif.

Comme son titre l’indique, ce nouveau Rainbow six se déroule presque exclusivement dans la ville du péché en plein désert du Nevada. Le recours à un background plus palpable que les traditionnels entrepôts / plates-formes pétrolières / aéroports des précédents opus permet d’impliquer le joueur de manière plus personnelle. Ne pas espérer toutefois une reproduction littérale de la ville : les développeurs se sont plutôt inspirés de son atmosphère si particulière pour créer leur propre version de sa géographie. Un rendu étonnant basé sur un contraste appuyé entre ombres et lumières et sur l’absence totale d’habitants, provoquant un curieux sentiment de désolation qui tranche avec le réalisme affiché du gameplay et donne à Vegas une atmosphère presque irréelle. En prenant le risque de bouleverser la grammaire de la série, Ubisoft Montréal a réussi le tour de force de faire rimer tactique avec progression tendue et rythmée. Tango down !