Halte-là ! Pas question de se faire bluffer par la puissante technique et graphique de la Dreamcast. Ne jouons pas le rôle de l’innocent consommateur aux poches pleines, prêt à se laisser éponger pour quelques millions de polygones. Le nouveau bébé de Sega n’est ni la première ni la dernière console à sortir et donc à jouer de ses affriolants Mips (millions d’information par seconde) pour perdre le chaland dans la débauche d’effets visuels. Et Speed devils n’est pas là pour me contredire… Issu de l’école « jeux uniques pour multi-plates-formes », ce jeu de bagnoles, avant de se faire opérer, se faisait appeler Speed busters aux tendances PCistes affirmées. Sans repasser dessus, autant s’en passer, il prouvait haut la main que les PC manquaient encore singulièrement de fun pour tenter d’égaler l’arcade consoleuse. Pour être honnête, Speed devils a subi plus qu’un ravalement de façade superficiel. Si la première chose qui saute aux yeux est la flamboyance des graphismes accouplée à une finesse de résolution encore inédite sur console, l’équipe qui s’est occupée du portage sur Dreamcast ne s’en est pas contentée. L’autre différence réside dans la jouabilité revue et corrigée : la conduite est nettement moins chaloupée. Déjà ici, en France, on n’a guère l’habitude de manœuvrer des espèces de baignoires à pétrole, si en plus elles doivent nous donner le mal de terre…

Pourtant, au niveau des sensations, ce n’est toujours pas ça. L’impression de vitesse n’est toujours pas digne des plus grands hits comme Driver, Gran turismo ou Ridge racer. Mais bien plus grave, c’est l’intelligence des adversaires qui pêche totalement. Que vous soyez un as ou un manche, vous allez vite vous retrouver dans les mêmes conditions, c’est-à-dire piteusement seul. Le départ oublié, on observe inexorablement les concurrents s’éloigner. Plutôt frustrant que de se retrouver à arpenter des circuits bien pensés mais sans accroches, sans concours de rugissements de moteurs ! Sur les 13 circuits vous vous retrouvez donc parfois à devoir contempler les décors défilant à toute berzingue, à éviter les quelques pièges que les concepteurs ont disséminés ici et là (avalanches, éboulements, volcans, T-Rex en vadrouille…) et à trouver les nombreux passages secrets. Avec sa quinzaine de voitures typées 50’s ou 60’s aux peintures parfois aux limites du bon goût, Speed devils nous avait pourtant bien mis l’eau à la bouche. Son championnat, lui, touche les frontières du légal, puisque pour réparer son bolide qui débine en morceaux aux moindres chocs (vous démarrez avec un cercueil en piteux état), voire en changer, il vous faut amasser du fric en battant les records de tour ou en se plaçant parmi les meilleurs. Mais le top du top, ça se passe sous le manteau à la fin d’une course, lorsqu’un concurrent peut vous proposer un pari du style flamber à tombeau ouvert devant un radar…

De bien bonnes idées mais qui ne vous empêcheront hélas pas de vous lasser du jeu plus rapidement que ne l’avaient prévu vos 400 F. Le mode deux joueurs est dans la même lignée, malgré tous ses modes possibles (distance maximum entre les deux joueurs, attaquant/défenseur où l’un doit dépasser l’autre le plus rapidement possible…), c’est un terrible goût de fadeur qui nous reste sous les pouces…