Jusqu’à présent, Soul calibur n’était qu’un « mythe d’estime ». Sorti sur une console au succès mitigé, la regrettée DreamCast, suite camouflée de Soul blade, déjà très bon mais un peu éclipsé par l’écrasant Tekken 3. Certains jeux ne se seraient jamais relevés d’un tel CV. Mais Soul calibur a ouvert le ban des jeux de combat 128bits. A l’époque, c’était une claque monstrueuse. Technique, graphique et ludique. Depuis on n’a mesuré la qualité des jeux de baston qui ont eu la lourde tâche de lui succéder qu’à l’aune du chef-d’oeuvre de Namco. Evidemment, par la suite, il y a eu plus beau (Dead or alive 3), plus complexe (Virtua fighter 4). Soul calibur est tout de même parvenu à se cramponner à son piédestal. Parce qu’il constituait une sorte d’idéal du jeu de baston : consensuel, fédérateur, ni hardcore, ni casual-gamer. Un équilibre parfait, un soupçon d’originalité -l’utilisation des armes blanches-, une classe insurpassable. Même le mastodonte Tekken a fini par s’y casser les dents…

Ne restait plus qu’à démocratiser un jeu appelé par sa nature profonde à un succès commercial plus large. Namco n’a pas fait les choses à moitié : Soul calibur est devenu un titre multi-plates-formes. Généralement, c’est plutôt mauvais signe. Un sort réservé aux licences foireuses et qui induit un inévitable nivellement par le bas pour s’adapter aux plus faibles supports.. Soul calibur II a su éviter les pièges du multi-supports, mais on est encore très loin du choc provoqué par son prédécesseur. Le fossé technique est forcément moins important, et puis il y a quelques ratés esthétiques. Le lifting facial des combattants, par exemple, laisse à désirer. Surtout ceux des femmes, parfois hideux, sauvés par une hypertrophie mammaire à la Dead or alive et quelques petites culottes impudiques. Les arènes sont plus détaillées, plus colorées… Certaines sont même bluffantes -le moulin à vent, la bibliothèque-, mais le jeu y perd paradoxalement en suggestion. Soul calibur II baigne dans une atmosphère plus intimiste, une chevalerie de boudoir, moins épique, moins grandiose.

Si le jeu n’a pas forcément gagné à être ravalé, il conserve tout de même la quasi-totalité de sa puissance ludique. Son gameplay n’a pourtant pas énormément évolué. Quelques nouveaux coups, quelques nouvelles têtes -le sinistre et arrogant frenchie Raphaël, un Necrid assez hideux dessiné par Todd McFarlane-, quelques bonnes surprises -le retour de la quête des armes de Soul blade-, mais on retrouve rapidement ses bases. La prise de risque est minime, mais la recette fonctionne encore à merveille. Certes, on aurait voulu plus que ce Namco a bien voulu nous donner : des arènes à l’architecture moins plan-plan, une refonte plus substantielle du gameplay, une véritable claque technique. Cela dit, on comprendrait presque que l’éditeur se soit contenté de si peu. Manifestement, Soul calibur II n’a pas été pensé comme une suite. Plutôt comme une deuxième chance, l’occasion de faire découvrir une excellente licence au plus grand nombre, quitte à la rendre un peu plus bourrine. De fait, Soul calibur II, ça n’est finalement que « Soul calibur en mieux », ou plutôt « Soul calibur mainstream ». Mais comme on a débranché l’infortunée DreamCast depuis belle lurette, et que les jeux de baston 3D de ce calibre se font rare, on se voit mal faire la fine bouche.