Zettai zetsumei toshi : derrière ce patronyme nippo-barbare se cachait un jeu que tous les amateurs de curiosités japonaises espéraient voir débarquer dans nos vertes contrées. Un espoir bien mince, évidemment, comme pour la plupart des jeux très « typés » sortant des sentiers battus, mais un éditeur, Agetec, a décidé de prendre le risque de localiser ce jeu si « japonisant ». Rebaptisé assez peu gracieusement SOS The Final escape, Zettai zetsumei toshi sort donc miraculeusement en Europe, offrant une bien belle occasion pour ceux qui voudraient se démarquer du tout-venant vidéoludique de goûter à quelque chose d’un tant soit peu différent.

SOS The Final escape n’est pas un simulateur de tremblements de terre, d’ailleurs, si on gratte un peu le vernis novateur et original, on s’aperçoit bien vite qu’en dehors de quelques partis pris courageux -habillage sonore minimal-techno-, il s’agit surtout d’un jeu d’aventures classique, lorgnant du côté du survival-horror : un survival sans morts-vivants ou autres goules, et au cours duquel il faut économiser ses rations d’eau plutôt que ses munitions. Il n’y a pas une secousse, pas un effondrement qui ne soit scripté, mais ça n’a finalement que très peu d’importance. Ce qui compte ici, c’est le contexte, le jeu n’étant pas spécialement beau surtout au vu des productions les plus récentes sur PS2. Mais le gigantisme des décors, l’esthétique de la destruction confèrent au jeu une atmosphère à la fois apaisante et angoissante. Dans les passages les plus impressionnants de SOS, on a même l’impression d’être plongé dans les planches les plus apocalyptiques d’Akira, par la grâce de décors presque abstraits et totalement déconstruits. Et même si la route est déjà toute tracée, on ressent souvent cette confusion et ce sentiment de perdition qui doivent frapper de plein fouet les rescapés d’une terrible catastrophe. A l’instar de jeux comme Silent Hill ou Shenmue, la ville, même meurtrie, est une personne à part entière, dangereuse malgré elle, dans son obsession de panser ses blessures sans se soucier de ceux qui l’habitent. Hélas, sur la fin, dès lors que la véritable intrigue se met en marche, avec son lot de politiciens corrompus, de businessmen véreux et de tueurs à gages coriaces, le jeu perd un peu de sa force poétique. On s’éloigne un peu des plages contemplatives pour rejoindre les eaux plus communes du film catastrophe à l’américaine.

Une impression renforcée par une localisation du jeu assez peu subtile. Alors que SOS The Final escape brasse des thématiques et des récurrences typiquement japonaises, les distributeurs du jeu en Europe et aux Etats-Unis ont décidé d’occidentaliser, voire d’américaniser le contexte de Zettai zetsumei toshi. Une décision d’autant plus stupide que les modifications ont été effectuées à la va-vite. Les personnages principaux ont, pour la plupart, été teints en blond mais ont conservé leur visage asiatique. Du coup, on a plus la sensation d’incarner des japonais déguisés en fausses blondes plutôt que des américains bon teint. C’est un peu idiot parce que le jeu perd un peu de son charme dépaysant. Cela dit, même sous le joug d’une aryenisation à la truelle, il conserve en grande partie sa beauté évocatrice et sa particularité.