L’heroic fantasy comme la science fiction ont toujours aimé les gouffres, les abysses, ou les falaises à perte de vue. Serait-ce une manière d’illustrer par leur géographie la nature vertigineuse de ces mondes alternatifs dans lesquels lecteurs et joueurs sont supposés se perdre ? Qui sait ? Quoiqu’il en soit, un mois après son lancement sur PC et OSX, le débarquement sur iPad de Hearstone: Heroes of Warcraft le prouve encore : avec son jeu de carte en ligne, Blizzard envoie un titre puissant et qui sur tablette hypnotise instantanément. Hérité de Magic et cie, Hearthstone reprend la formule consacrée du genre : des cartes à collectionner aux multiples pouvoirs (attaque, défense), une jauge se remplissant à chaque joute en tour par tour, un deck à gérer qu’on peut éventuellement enrichir moyennant financement, et c’est à peu près tout. On pioche ainsi dans une main distribuée aléatoirement, on abat ses cartes avec stratégie, et les tours s’enchaînent avec la frénésie d’une belote enivrée.

Simplicité des règles, évidence des mécaniques, le jeu se révèle surtout écrasant d’efficacité, poussant au calcul rapide avec une souplesse déconcertante : à chaque attaque entre elles les cartes perdant des points de vie, le jeu oblige à jouer sur l’ordre, les placements, jongler avec les compétences. Le mode connecté -le seul qui compte le solo ne servant qu’à débloquer une galerie de personnages rapidement acquis -, ouvrant définitivement la brèche vers des parties sans cesse renouvelées et qui, devenues mobiles (ou presque), installent mieux le concept dans l’idée du jeu à courte durée auquel on revient tout le temps. L’occasion surtout de retrouver l’essence du jeu de carte, avec de nouveaux adversaires en permanence ou la possibilité de jouer avec ses proches, l’efficacité de Blizzard pour bâtir une expérience solide sur ce terrain n’étant plus à prouver.

Toute l’ambition du titre se trouve dans cette idée d’installer un jeu de carte hyper intuitif, connecté, ouvrant grand les portes d’un genre ordinairement réservé aux collectionneurs de salles de jeux. Une démocratisation massive aux allures de blockbuster de longue durée, puisque c’est bien le but de toute collection, être sans fin, continuer pour toujours.