Un an d’attente pour ça -à croire que le jeu est venu du Japon à la nage ! Un nouvel épisode d’une saga qui s’essouffle mais qu’on a continué à aimer, jusqu’au neuvième épisode, compile bâtarde qui s’acharnait à vouloir retrouver l’esprit « âge d’or » des épisodes sur SNES. C’est peu dire qu’on se préparait à l’aduler ce Final fantasy X (FFX), ne serait-ce que parce qu’il semblait prolonger la volonté du huitième opus à explorer des sentiers esthétiques s’écartant de l’habituelle mixture médiévale-fantastique. Un huitième opus, mal-aimé et mal-compris mais qui semblait vouloir donner un coup de jeune à une série qui ne savait plus trop vers quelle pente se diriger… FFX sonnait comme une deuxième chance pour l’équipe de FFVIII -le chara-designer controversé Tetsuya Nomura en tête- d’imposer leur vision en corrigeant les petits défauts de cet opus si discutable.

Un a priori positif, donc, confirmé par des débuts placés sous le signe de l’ensoleillement et des couleurs pétantes. Passé une mise en bouche un peu laborieuse et tristounette de quelques minutes -au cours de laquelle on voit Tidus, jeune chébran streetwear, champion de Blitzball, le waterpolo local, échapper de peu à la destruction de sa ville Zanarkand par une entité nommée Sin qui l’aspire et le projette 1000 ans dans le futur-, l’univers du jeu devient véritablement enchanteur. Dès lors que le héros débarque sur l’île de Besaid, petit paradis tropical dans lequel le chara-design nippo-tribal de Nomura fonctionne à merveille, on se trouve plongé dans une ambiance tropicale à la Chrono Cross. Tidus rejoint le groupe de Gardiens qui protège l’invocatrice Yuna dans sa quête pour éradiquer Sin du monde de Spira, et jusqu’à la ville de Luca leur voyage est un dépaysement total… Hélas, le plaisir est de courte durée, le reste n’est plus qu’une longue autoroute bordée des clichés récurrents de la série.

Les concepteurs du jeu ont fait une énorme erreur : ils ont supprimé la carte 3D sur laquelle se déplaçait les protagonistes des FFs précédents. Une carte qui permettait non seulement d’insuffler un peu de liberté à un gameplay très scripté, mais aussi, en quelque sorte, de créer une certaine adhésion entre le joueur et l’univers du jeu. FFX, lui, se résume à un long, très long chemin à sens unique. Exit l’atmosphère paradisiaque du début, les héros de FFX vont devoir traverser un catalogue de contextes prémâchés : déserts, forêts, montagnes glacées, tout y passe pour donner un semblant de variété mais la cohésion graphique du jeu s’en ressent et l’originalité d’origine part en fumée. Evidemment, le jeu devient TRÈS linéaire. Quasiment plus de villages ou de cités dantesques, rien que cette putain de ligne droite et des donjons bourrés d’énigmes un tantinet casse-couilles à la Myst. Et ce jusqu’au boss final, où l’on nous laisse enfin un peu de marge pour se plonger dans les quêtes annexes. Elles sont nombreuses, mais le coeur n’y est plus, d’autant qu’il faut être foutrement patient pour supporter les attaques aléatoires incessantes -un système dont devrait définitivement se débarasser les FFs. Seul véritable oasis de liberté : les Calm Lands, grande vallée désertique dont le design rappelle la fameuse carte 3D et dans laquelle s’éparpille quelques quêtes secondaires. Et qui laisse entrevoir ce qu’aurait pu être ce FF nouvelle génération…

Il y a certes quelques bonnes idées éparses. Le système de combat, plus dynamique, revenu à un tour par tour classique au cours duquel on peut alterner les différents membres de son équipe. Les affrontements deviennent plus stratégiques, plus vifs mais les nombreuses animations poudre aux yeux ralentissent le dynamisme des combats et finissent par gaver. Seule grande nouveauté : la suppression des niveaux et des points d’expérience. La progression des personnages se fait désormais sur une « sphere grid », sorte de jeu de l’oie où les cases doivent être activées par des sphères pour permettre à chaque personnages de gagner de nouvelles aptitudes ou d’améliorer ses caractéristiques. Un système très complexe mais très intéressant même s’il devient plus ardu de jauger de la puissance de ses personnages. Il y a aussi le « mini-game » du Blitzball, plutôt bien pensé malgré sa parenté trop évidente avec les mécanismes du RPG -mieux vaut ne pas s’attendre à de l’action frénétique… Graphiquement, le jeu oscille entre du PS2 haut de gamme et du PS1 haute déf’ à grands renforts de textures brouillonnes et intérieurs en précalculé, entre le très beau et le fadasse. Enfin, désormais les personnages parlent, grande première dans la saga.

FFX n’est pas un très bon jeu, ça n’est surtout pas un très bon crû. Il aurait pu faire un film honorable, bien plus original que le plan-plan ricain The Spirits within. SquareSoft sait y faire question cinématiques, mais leur série phare a du plomb dans l’aile… Mieux vaut rejouer à Skies of Arcadia sur Dreamcast, le meilleur RPG 128bits pour l’heure ou attendre FFXI (pas avant 2004 en Europe alors que le jeu vient de sortir au Japon). Soit un FF online, le grand saut vers le MMORPG, peut-être la dernière chance pour la saga de retrouver un peu de fraîcheur en dehors des gadgets techniques qui masquent difficilement un gameplay vieillissant et obsolète.