Amplitude est la suite de Frequency, musical à l’occidentale qui nous avait laissés perplexes à l’époque de sa sortie. Non pas que son concept soit mauvais : aux commandes d’une espèce de pod à la WipEout, on avance sur un rail immense composé de plusieurs pistes correspondant à diverses composantes de l’orchestration d’une chanson -voix, batterie, guitare, etc. Pour activer une piste, il faut tirer sur des boutons placés sur la droite, sur la gauche, ou au milieu de la piste, en appuyant sur la touche de la manette correspondante. Un gameplay simple, caractéristique du genre. Seule ombre au tableau : la plupart des musicals nippons associent directement et de façon logique leur maniabilité aux touches du pad. Or, ici, rien ne correspond, sur le pad de la PlayStation 2, à quelque chose qui pourrait représenter la gauche, la droite et le milieu d’une piste. On aura beau configurer à l’envi les touches de la manette, il manquera toujours à la maniabilité l’aspect instinctif indispensable à tout musical qui se respecte. Evidemment, dans Frequency, on finissait par s’y faire, voire briller dans les niveaux les plus ardus. Mais rien à faire, on n’atteignait jamais le degré de confort ultime. Vu la rapidité des derniers niveaux, il fallait, de toutes façons, se tourner vers les gâchettes de la tranche de la manette, un pis-aller qui ne donnera jamais pleinement satisfaction : il y a toujours ce putain de décalage entre le cortex et les doigts, entre ce qu’on voit sur l’écran et ce qu’on doit faire avec le pad.

Amplitude ne change pas la donne, puisque le gameplay est resté peu ou prou le même, à quelques modifications près. Le problème persiste. Ca ne signifie pas que le jeu soit mauvais, ou injouable. Mais il semble toujours à la traîne par rapport à ses concurrents japonais, nettement mieux pensés, beaucoup plus intuitifs. C’est presque inévitable, Harmonix aura beau pondre une tétrachiée de sequels plus ou moins liftés, la licence est condamnée à jouer les seconds couteaux perfectibles. D’autant qu’Amplitude peine aussi à rivaliser avec l’univers dépaysant des musicals nippons -le côté cucul-kawai, l’exotisme des mélodies acidulées de la J-Pop. Prudents, les graphistes d’Harmonix ont préféré piller le design de Rez, le musical-shoot de Sega, sa 3D filaire « tronesque », son dénuement minimal-techno. C’est dans l’ensemble plutôt réussi, mais Amplitude fait tout de même figure de suiveur, moins classieux, parfois plus douteux esthétiquement -les personnages ringards qui font office d’avatars-, que son prestigieux modèle. Musicalement, c’est encore pire : à l’electro avant-gardiste de Rez s’est substitué une compile de morceaux semi-mainstream qui ressemblent à une playlist « MCM tubes ». Bowie (en petite forme), Pink, Slipknot, Garbage, Weezer… Pas vraiment déshonorant. Pas vraiment excitant non plus.

Avec ses airs de Rez-wannabe, sa musique d’ambiance de Fnac et sa jouabilité boiteuse, Amplitude ne risque pas de passer à la postérité. Même si le challenge est à la hauteur des gamers les plus tenaces, on préférera toujours s’user les doigts sur Gitaroo man, se ridiculiser sur Dance dance revolution ou Samba de Amigo, admirer l’improbable plastique d’Ulala de Space channel 5, ou se laisser envoûter par l’univers poético-rhizomique de Rez.