Les Alabama 3 sont une jolie bande d’escrocs qui ont bien assimilé la leçon du rock : Take the money and run. Entourant leurs activités et leurs motivations de gros écrans de fumée -sauf, bien entendu, lorsqu’il s’agit d’argent-, les premiers disciples du Révérend D. Wayne Love, prédicateur autoproclamé représentant sur terre de l’héritage (au sens propre) d’Elvis, pour lequel les qualificatifs de bandit, fumiste, arnaqueur ou roi de la dérision sont autant d’euphémismes, prêchent le non-dit qui veut tout dire. Johnny (batteur), dans le rôle du porte-parole, et Pearce (percussions), accessoirement hocheur de tête, vous donnent ici un aperçu de leurs talents de communicateurs. Un entretien édifiant sur la planète Elvis.

Tête de l’art : Pourquoi ce nom, Alabama 3 ?

Johnny : Alabama, c’est en référence à l’Amérique, et 3, parce que c’est un bon chiffre.

Mais pourquoi 3 ?

Johnny : Nous ne souhaitons pas l’expliquer, mais comme pas mal de chiffres, il a une signification mystique, magique.

Pourquoi avoir fait de la musique plutôt qu’autre chose ?

Johnny : Eh bien, nous faisons d’autres choses en dehors de la musique, mais c’est top secret. Nous attendons d’être sûrs de notre coup pour envahir la terre et toucher un public différent qui ne s’attend pas du tout à ça. En attendant, la musique c’est bien, c’est un vecteur de communication que tout le monde connaît bien.

Quelle serait votre influence la plus importante : le blues, le gospel, le rock ou la dance ?

Johnny : Je crois que c’est le blues et le gospel.

Pearce : Oui, mais la dance est très importante aussi. C’est une musique que nous apprécions beaucoup.

Johnny : De toute façon, nous n’écoutons pas tant de musique que ça. Assez peu, même. On est trop occupés à regarder la télévision.

Comme quoi ?

Johnny : Oh des séries, énormément de dessins animés, des pubs…

En quoi croyez-vous ?

Johnny : Si on croit en quelque chose ou quelqu’un, c’est sans nul doute Elvis.

Pourquoi ?

Johnny : Ok, je vais vous le dire, c’est parce qu’Elvis a écrit et érigé des lois qui sont de celles qui régissent toute l’existence, toute la vie. Il a pondu des blues exceptionnels, tourné des films dans des églises hawaïennes et est mort au faîte de sa gloire.

Est-ce vous croyez à la vie après le mort, ou à une certaine forme de résurrection ?

Johnny : Oui, à la résurrection d’Elvis. D’ailleurs, nous sommes en train de travailler à un film, basé sur la même idée qu’Alien resurrection, qui s’appellera Elvis résurrection. Je ne peux pas en dire davantage, mais Elvis réapparaîtra par l’intermédiaire du Révérend D. Wayne Love (inspirateur et leader charismatique de toute la petite bande Alabama 3, ndlr). En plein milieu d’une performance scénique du Révérend, Elvis surgira de ses entrailles.

Qu’est-ce c’est que toute cette histoire autour de Loving you (plaquette du groupe prétendument éditée par The organ of the First Presleyterian Church of Elvis the Divine Uk, ndlr) ? Quelle en est la philosophie ?

Johnny : C’est un énorme boulot, qui a demandé beaucoup d’énergie et des années de genèse. Il est impossible de résumer ce sommet de la réflexion et de l’art en quelques mots, il faut le lire pour le croire.

(en fait, un plan en douze étapes pour devenir un disciple exemplaire prévoit une soumission totale au Révérend, des dons d’argent importants et des relations sexuelles poussées, que ce soit pour les hommes, femmes ou toute autre « créature de Dieu » ! Dans d’autres passages de cet opuscule hilarant, il est mentionné l’usage de certaines drogues, et il y a même un « horoscope »…L’un des buts avoués du Révérend est le rachat de Graceland, la maison d’Elvis, ndlr).

Le Plan en douze étapes, c’est une blague un peu grosse, non ?

Johnny : En fait, ce sont des travaux pratiques à faire à la maison. Cela n’a rien d’irréaliste. Nous l’avons mis en pratique avec plusieurs personnes depuis quelques mois, essentiellement des femmes, et ça marche…Tout le monde peut y arriver.

Pensez-vous que la plupart des gens ont besoin de croyances religieuses ?

Johnny : Oui, sans aucun doute. Si on n’a même plus la religion comme refuge, que nous reste-t-il ? Les ? Non, ça ne fait pas partie des préceptes Elvis. Et puis, s’il vivait encore, il mangerait peut-être des hamburgers, mais artisanaux. Certainement pas des MacDonalds.

Que pouvez-vous promettre aux gens qui écouteront assidûment votre musique ?

Johnny : Le Septième Ciel. Les portes du Paradis s’ouvriront toutes grandes à eux.

Si quelqu’un vous offre son âme, que lui donnez vous en échange ?

Johnny : Dix balles !

S’il vous offre tout son argent ?

Johnny : Oui, s’il vous plaît, nous avons besoin de dons importants pour l’Eglise d’Elvis le Divin. Envoyez au Révérend D. Wayne Love la plus grosse somme possible. On vous fera parvenir un badge, une lettre d’informations et une carte de membre à vie.

Que ferez-vous avec tout cet argent ?

Pearce : On prendra sûrement du bon temps, et on rachètera aussi Graceland.

Johnny : Oui, on a déjà pas mal d’argent de côté pour cette entreprise. Il faut vraiment qu’on y arrive. Cette maison sera le quartier général de notre Eglise.

Prenez-vous les cartes de crédit ?

Johnny : Pas de problèmes, American Express, Visa, toutes les cartes sont les bienvenues…

Propos recueillis par

Alabama 3, Exile on Coldharbour lane (Elemental/Virgin)