Chacun cherche sa place dans ce premier long métrage de Sylvie Verheyde. Un frère et une soeur vivent chez leur mère à Arcueil. Loïc, l’aîné, est photographe. Il en a marre de glander dans sa banlieue, il veut réussir vite et bien. Sophie, animale et instinctive, ne sait pas encore très bien ce qu’elle veut, mais elle fonce quitte à se prendre des claques de temps en temps. En attendant, elle tombe amoureuse de Vincent, l’ami bourgeois et branché de Loïc. Et puis il y a aussi Tony qui galère et Virginie, dont Loïc ne veut plus. Tous ont conscience d’être à un tournant de leur vie, ils cherchent leur place, un endroit pour exister. Malgré les difficultés, ils ne sont pas prêts à se résigner .

Un frère, comédie dramatique dans l’air du temps, évite l’écueil propre à bon nombre de films à vocation sociale: le misérabilisme. C’est également (et peut-être surtout) une histoire d’amour, forte, troublante et exclusive d’un grand frère pour sa petite soeur. Ces deux-là se cherchent, s’apprivoisent. On sent toute la sympathie de la réalisatrice pour ses personnages malgré leur valse- hésitation. Sa manière de filmer à la fois nerveuse, amoureuse et sensuelle reflète bien l’état d’esprit de ses protagonistes.
La prestation remarquable des acteurs n’est pas pour rien dans la réussite du film. Celle de Nils Tavernier (Vincent) vu récemment dans Post coïtum… de Brigitte Rouän est une fois de plus d’une grande justesse. Le rôle-titre du frère est incarné avec fièvre et force par Jeannick Gravelines, déjà présent dans les courts métrages de la réalisatrice. Son air buté, sa fougue et sa façon de bouger évoquent par moment Grégoire Colin dont il pourrait être le grand frère. Quand à Emma de Caunes, elle est la véritable révélation de ce film. La jeune comédienne au naturel bouillonnant s’offre avec ce premier grand rôle, un passeport pour la gloire. Elle est tour à tour drôle, émouvante et agaçante. Mais surtout, elle possède ce que beaucoup cherchent durant toute leur carrière : la grâce. Allez donc la découvrir au plus vite dans Un frère, premier film extrêmement vivant et singulier que l’on n’oubliera pas de sitôt.