Forte était la tentation de faire entrer The Lost son dans la catégorie « euro-pudding ». Tous les critères étaient réunis : une distribution internationale, un premier rôle en anglais pour Daniel Auteuil, un tournage à Londres et au Mexique. Au vu du premier tiers du film, ce qualificatif paraît gratuit, voire abusif. Au lieu d’un pudding indigeste, Chris Menges nous confectionne un soufflé plutôt léger, notamment grâce à un personnage principal tout en nuances. Xavier Lombard (Daniel Auteuil), policier français exilé à Londres et reconverti en détective privé, n’hésite pas, en effet, à jouer sur les deux tableaux : faire chanter une femme prise en flagrant délit d’adultère plutôt que de dire la vérité au mari, son client.
Lorsqu’un ancien collègue le contacte pour retrouver son beau-frère disparu, le réalisateur court-circuite habilement le classique film d’enquête. Au lieu de s’attarder sur une accumulation d’indices menant au coupable, il préfère filmer, de manière quasi documentaire, les déambulations solitaires de Daniel Auteuil. Malheureusement, un tel parti pris n’est en aucune façon motivé par un choix de mise en scène, mais au contraire par la défense d’une cause plus que critiquable. L’enquête est hors-champ car l’enjeu du film est ailleurs. Le disparu a, en effet, été éliminé par un réseau de pédophilie international. Le soufflé retombe alors très vite et la métaphore culinaire n’a plus de raison d’être tant elle exhale des relents nauséabonds. La pédophilie, sujet qui ne peut qu’indigner le spectateur, n’est que le prétexte à une apologie de l’auto-défense. Le parcours de Lombard se transforme alors en croisade sanguinaire digne du Charles Bronson d’Un Justicier dans la ville. Les méchants sont éliminés de manière particulièrement sadique, chaque meurtre étant justifié au nom de la « légitime » défense.

Non content de mener une bataille solitaire, Lombard fait preuve de prosélytisme. Les parents du disparu expriment une gratitude déplacée lorsqu’il leur avoue avoir tué le meurtrier de leur fils. De même, il apprend à tirer à un gamin d’à peine dix ans afin qu’il puisse se défendre contre ses anciens tortionnaires. Sous des apparences de film européen luxueux, The Lost son semble plus proche des blockbusters fascisants de Joel Schumacher.