A première vue, Ring ne pourrait être que le cousin nippon d’un certain cinéma occidental, celui de Cronenberg, de De Palma ou, plus récemment, de l’Espagnol Alejandro Amenabar. Un cinéma focalisé sur le décryptage de son propre langage, braqué sur l’image. Un cinéma cinéphile dont la mise en scène serait à la fois l’enjeu principal et le sujet premier. Dans Ring, tout tourne autour d’une mystérieuse cassette, condamnant les malheureux qui l’ont regardée à mourir sept jours après son visionnage. Pour percer le maléfice, une seule solution : analyser son contenu afin d’en comprendre la signification et d’en déceler les secrets de fabrication…

Malgré les références écrasantes, le réalisateur Hidéo Nakata s’en tire plus qu’honorablement : sa mise en scène est aussi sobre qu’efficace, réussissant à faire naître l’émotion là où on ne l’attend pas, comme dans ce superbe plan où la vase coulant des orbites d’un squelette dessine des larmes. Il tire aussi merveilleusement partie du travail sonore de Kenji Kawai, comme lors de ces flashes vidéo, zooms ultra-rapides et élégants, qui, ajoutés à un bruit strident, créent un effroi considérable. La vidéo tient quant à elle du collage surréaliste, étrange mélange d’images d’éruptions, de puits et de personnages interlopes au langage cryptique. Toutes ces qualités légitiment à elles seules un film que les esprits chagrins rejetteront peut-être, d’un injurieux « déjà-vu ». Ce serait trop vite le juger.

Méfions-nous en effet des apparences. Certes, Ring est habité par les thématiques évoquées précédemment, par cette fascination de l’image devenue, il est vrai, un peu trop à la mode. Mais le film de Nakata associe à cette figure archi-rebattue une autre beaucoup plus originale, celle de la contamination. Dans Ring, les images ne se contentent pas de fasciner, elles se multiplient, s’étendent, selon un principe à la fois esthétique (la mise en scène décuple cet aspect viral en créant habilement des mises en abyme) et narratif (le réseau, toujours et encore). Usant de son scalpel à l’intérieur de la société japonaise, Hidéo Nakata diagnostique une maladie des images, surenchère médiatique qui emporte tout sur son passage et qui s’inscrit dans la pratique cinématographique ou télévisuelle, puisque l’image s’y donne simultanément à tous. Etonnante et décisive ubiquité que le cinéaste a su délicatement mettre en valeur.