Au secours, Sigue Sigue Sputnik est de retour ! Génies auto-proclamés et prétendument « 5e génération du rock’n’roll » (rien que ça !) ces braves punks sur le retour (dont un reliquat d’ex-Generation X : Neal X et Tony James) ont bel et bien su organiser un coup d’état, en 1986, dans les charts avec leur terrible Love missile F1-11 que chacun a possédé à l’époque (y’a pas de honte). Très vite leurs têtes d’ahuris, entre Drag Queen sous coke et Mad Max d’opérette, se sont imposées dans notre morne quotidien à grand renforts de singles ravageurs (21st century boys, Sex bomb boogie, Rock it miss USA…) qui en disaient long sur leur louable objectif : être la nouvelle machine à fantasme rock’n’rollienne ou rien !

Caramba, encore raté ! Qu’est-ce qui n’a pas fonctionné ? Leur chant de guerre « shoot it up… Love missile F1-11 » fut quasi-simultanément leur chant du cygne : après Flaunt it, leur premier album propulsé disque d’or avant même de sortir (ils avaient pré-vendu les plages de silence entre les morceaux comme espaces de pub à M6, MTV, NRJ…), la chute fut aussi vertigineuse qu’inexorable. Chacun jurait ses grands dieux n’avoir jamais aimé ce groupe vulgaire et préfabriqué. Dehors les clowns, direction les poubelles surpeuplées de l’Histoire du rock. Escrocs avérés et rompus aux méthodes de Malcom Mc Laren, les Sigue Sigue Sputnik ont échoué là où les Sex Pistols ou Billy Idol (pour ne citer qu’eux) ont fait scandaleusement recette. Pourtant, les Sigue Sigue Sputnik sont au moins aussi drôles que les Pistols, au moins aussi crédibles que l’Idol (toujours au hasard). Le mystère reste entier et, curieusement, à la ré-écoute des titres de ce Best of, les chansons de Sigue Sigue Sputnik tiennent largement la distance pour du prêt-à-jeter (Flaunt it -approximativement Gaspillez ça- était l’injonction du premier album). Bien sûr, chez eux, on est plus proche du pillage que de l’inspiration mais l’authenticité n’est pas leur credo, répétons-le (on a pu voir les Sigue Sigue Sputnik affublés de deux batteurs sur scène alors que tous leurs morceaux sont dépourvus de batterie -« C’est pour faire comme Gary Glitter » disent-ils !).

Sur cette compilation, Sigue Sigue Sputnik balance frénétiquement son rock transgénique : tous les titres commencent comme tous les morceaux de Suicide, à tel point que Neal X a cru bon d’imiter jusqu’aux hoquets bioniques d’Alan Vega… Le guitariste, particulièrement spartiate, répète à l’envi ce qu’il a retenu de sa méthode de guitare « Assimil », c’est-à-dire la leçon n°1 : devenez Chuck Berry en 10 minutes. L’homme-Sputnik étant exempt de tout remords, il pioche les quelques mots lui servant de texte chez ses glorieux aînés : que ceux chez qui 21st century boys n’éveille aucune réminiscence jettent une oreille sur n’importe quel Best of de T.Rex. Mais soyons bons princes, parfois ils innovent en faisant par exemple du Rocket USA de Suicide leur Rockit miss USA (y a du travail !). Ceci dit, depuis les Ramones, on n’a plus vu une telle poétique rock : « From the 21st century/oh oh Stereo, Video, Sci-Fi Sex/Let’s go-go-go Let’s go/Saturn Dreams, Laser Beams » (dans Teenage thunder).

« History will prove us right !  » affirment-ils sans rire (?). On aimerait les croire mais la deuxième moitié du Best of (après le premier album) nous fait entendre un Sigue Sigue Sputnik pâlichon : abandonnant leur rock trisomique et perturbé pour un recentrage FM et mainstream, ils perdent tout intérêt et le fait qu’on n’ait jamais entendu depuis une seule note de Success (ils insistent) ou Frankenstein cha cha cha prouve qu’ils se sont franchement égarés. Comme tout Best of, ce disque annonce les préliminaires d’une nouvelle invasion, en l’occurrence un nouvel album. Est-ce que l’histoire leur donnera raison ?