Le Sandler-film n’est pas la plus folichonne des perspectives de comédie américaine. Quand Chuck rencontre Larry, signé Dennis Dugan (le sinistre Pygmalion d’Adam Sandler, déjà coupable de Big daddy), n’est pas là pour rassurer : le duo Sandler-Dugan s’attaque à l’homosexualité et s’adjoint les services de l’adipeux Kevin James. Bon, le film évite de justesse le naufrage annoncé. Loin de chercher à raffiner son packaging comme cherchait à le faire Click (de Franck Coraci, autre mentor de Sandler), l’acteur s’accommode correctement de ce postulat graisseux. Au point d’en trouver un peu de chaleur humaine et quelques enjeux intéressants.

Le scénario met aux prises, au sein d’une brigade de pompiers new-yorkais, un veuf inconsolable et son collègue tombeur. Décor assez réjouissant car, contre toute attente, Dugan choisit une bienveillance quasi surréaliste envers ses têtes d’affiche, petites gloires locales alignant ici les paniers au basket, éteignant là les incendies d’un coup d’arrosoir. Il y a bien une faille dans la petite vie réglée des beaufs winners. Afin d’assurer à ses enfants tutelle et sécurité financière, Kevin James propose à Adam Sandler de se pacser. Flairant l’arnaque, l’administration américaine enquête sur leur homosexualité, ce qui oblige le couple à accumuler les signes ostentatoires de gay attitude.

La fable sur la tolérance déroule, équilibrant homophobie primaire et conscience progressiste (on est tous homo). Question gag, c’est souvent too much, mais le film trouve de quoi faire tourner la machine : soirée déguisement (assez poilante), séquence mariage au Canada, coming out improbable et savonnette à ramasser sous la douche. Au moins Dugan prend le genre sans pincettes avec une bonhomie de caricaturiste finalement inoffensif, tant l’obsession de la gaudriole l’emporte sur l’idéologie. Du coup le film s’épanouit dans l’aberration ou la caricature grossière, recouvrant le réel d’un molleton cartoonesque proche de l’abstraction. La preuve avec Kevin James déguisé en pomme lors d’une soirée gay : le grotesque triomphe jusqu’à diluer absolument la symbolique érotisante. La réaction des collègues, dont l’approbation au nouveau couple se retourne au fil des gags, ne dit pas autre chose : penser à la réaction comique plutôt qu’à tisser une réflexion, avancer scène par scène, la morale suivra le mouvement. Au milieu, les acteurs cachetonnent dans une cohérence professionnelle proche de la perfection, trouvant par moments à densifier la soupe, surtout Kevin James. Le moins qu’un film de faiseur puisse faire ? Le mieux ici.