Produit par Michael Mann, starring Jamie Foxx, Le Royaume fait évidemment du pied aux admirateurs du plus grand cinéaste américain en activité. Quand on sait que le film de Peter Berg aborde en outre un sujet plutôt en vogue à Hollywood – le bourbier iraquien -, les attentes grandissent encore. Riyad, Arabie saoudite : un double attentat à la voiture piégée ravage tout un quartier et provoque un carnage parmi les employés d’une société pétrolière américaine. Contre l’avis de tous, une section d’intervention du FBI obtient aussitôt le droit d’enquêter quelques jours sur place. Riyad se fait donc projection littérale du cauchemar bagdadien, et il suffit d’un générique à la CNN pour entrer de plain pied dans une sorte de politique-actioner aux velléités documentaires. Le film saisit immédiatement, et place le spectateur face à l’immédiateté sèche de ses effets : soit. Mais il faut tenir, reprendre sa respiration, s’assurer qu’un tel départ au forceps se déploie le temps d’un long-métrage entier. Et sur ce point malheureusement, ça se gâte très vite.

Au principe d’urgence qui régit Le Royaume, la réalisation sans saveur de Peter Berg n’offre que peu de réponses : accumulation, vitesse, étouffement. Si tout y passe comme dans un petit catalogue en accéléré de la terreur contemporaine (attentats saisis sur le vif, peur de faire trois mètres en territoire hostile, combats à l’arme lourde au cœur de la ville, enlèvement et tentative de décapitation), Berg manque de l’amplitude et du recul qui font les vrais cinéastes : styliste sans âme, il se contente d’une sorte de maniérisme télévisé pour enchaîner les rebondissements jusqu’à engorgement (le jeu « on est des pros » tout en poses frimeuses des acteurs, la fin grave précipitée, aux limites du grotesque). Pas de quoi pavoiser, donc, surtout si l’on songe que les techniques utilisées ça et là sont particulièrement lourdes (notamment le climax type L’Enfer du devoir de la fin – un gentil pépé sort une kalache de sous son oreiller). Le présent obsède Hollywood, c’est estimable. Ça n’empêche nullement de considérer Le Royaume pour ce qu’il est : un petit film efficace, mais trop péteux pour emporter franchement l’adhésion.