En optant pour l’adaptation d’une nouvelle de Michel Tournier (Le Nain rouge extraite du recueil Le Coq de Bruyère), de surcroît en noir et blanc, Yvan Le Moine n’a pas choisi la facilité pour son premier long métrage. Lucien L’hotte (Jean-Yves Thual), nain d’une trentaine d’années, découvre le sexe dans les bras de la comtesse Paola Bendoni (Anita Ekberg). Lorsque celle-ci le délaisse pour retourner auprès de son ancien amant Bob (Arno Chevrier), toute la rancœur qu’il a accumulé durant ses années de solitude se mettra au service d’une cruelle domination des autres. Il finira par se réfugier dans un cirque, et seul le regard innocent des enfants lors de son spectacle lui permettra de retrouver une certaine grâce. Le réalisateur réussit à échapper aux pièges évidents du sujet, Le Nain rouge n’est en aucun cas un lourd plaidoyer en faveur des « personnes verticalement déficientes ». Mais à force de vouloir échapper à tout prix au politiquement correct, Yvan Le Moine tombe dans l’excès contraire. Malgré une interprétation toute en finesse de Jean-Yves Thual et une photo particulièrement soignée, la fable cruelle de Michel Tournier tourne souvent à la grosse farce. L’entourage de Lucien n’est composé que de personnes stupides et cruelles. Quant aux personnages haut en couleur de Bob et Paola, le réalisateur les a voulu truculents, mais ils ne sont en réalité que lourdeur et excès. A l’autre extrême, se trouve la petite fille innocente (Dyna Gauzy) censée incarner une poésie salvatrice. Abstraction faite de ces oppositions trop faciles et de certaines lourdeurs, Le Nain rouge demeure un petit film curieux.