Sexe et mort. Ces deux entités séparées, voir antinomiques, sont devenues, depuis l’apparition du sida, un couple inextricablement lié. Partant de ce constat, Didier Le Pêcheur a voulu établir une sorte d’état des lieux des rapports humains, de la sexualité d’aujourd’hui.
L’ouverture du film, sous forme de paradoxe laisse présager, brièvement, une démarche originale. Telle une Belle au Bois Dormant version « trash », Teresa (Elodie Bouchez), décédée à la suite d’une overdose d’ecstasy, ressuscite lorsque Ben (Jean-Marc Barr), employé à la morgue, lui fait l’amour. Son seul désir sera alors de connaître son sauveur, de le comprendre pour tenter de le sauver à son tour. Car le « prince », que sa femme vient de quitter, est loin d’être charmant. Obsédé par une recherche de l’absolu, il a adopté une sexualité des plus extrêmes : partouzes, sadomasochisme, etc. Autrement dit : « Se faire peur, se faire mal pour se sentir vivant… ». Cet existentialisme priapique aurait pu être passionnant s’il n’avait été gâché par des dialogues constamment à la recherche de la réplique qui fait date, du bon mot qui tue. Ben, flanqué d’une bande de copains, tous partouzeurs plus ou moins convaincus, se veut le gourou des éclopés du sexe et nous gratifie constamment de ses aphorismes à deux sous. Ses sentences définitives sur l’amour, la mort, la vie et j’en passe, tel : « la vie c’est comme cette saloperie (le tabac), c’est une sale habitude, on a du mal à s’en défaire » ou encore « même si tu crois être l’esclave de personne tu seras toujours celui de ta bite » sont censées traduire une souffrance existentielle insupportable. Pesantes, dans un premier temps, elles finissent par nous agacer fortement. On en arrive presque à être d’accord avec Ducon (Martin Petitguyot) lorsqu’il crie à Ben : « Ta gueule, on s’en fout de tes états d’âme ». Non content de détenir la vérité, Ben va se poser en donneur de leçons à la fin du film. Lors de la partouze finale, il oblige son ami et complice Boris (Patrick Catalifo), sous la menace d’une arme, à « baiser » avec sa femme (Florence Darel). C’est alors que l’on commence à douter de l’honnêteté de la démarche du réalisateur. J’aimerais pas crever un dimanche sous des dehors provocateurs ne serait-il pas finalement extrêmement conservateur ? Le « tu as une femme, baise-la » asséné par Ben à Boris milite pour un retour à l’ordre conjugal et social qui serait le seul véritable abri en ces temps de sida. Dans ce moralisme de bon aloi se trouve l’unique perversion d’un film raté et hautement irritant.