Il est étonnant de voir comment le débonnaire barbu enchaîne en ce moment les films. A peine 6 mois après Amistad qui, faut il le rappeler, n’a sûrement pas dû avoir le succès escompté par son producteur, Il faut sauver le soldat Ryan sort sur nos écrans. Autant vous le dire, ce n’est qu’avec une impatience somme toute relative qu’ici nous attendions l’ultime morceau de cinéma du père d’E.T. Et pourtant, on ne peut définitivement pas dire que le soldat Ryan soit un mauvais film, et ce pour des raisons que je vais me forcer d’évoquer dans ces modestes lignes. En effet, outre un scénario des plus surréaliste (huit hommes sont envoyés pour sauver un soldat de seconde classe dans le but avoué d’éviter au général d’envoyer une lettre de condoléances à sa mère), des personnages achétypaux au possible (un gros capitaine buriné, un troufion pacifiste; une bête de guerre sanguinaire…) et une musique infatigablement insupportable, Le Soldat Ryan montre une scène d’une violence insoutenable qui justifie à elle seule le visionnage du film, à savoir les 20 premières minutes de l’œuvre, ou le débarquement en Normandie vue par un boucher en mal de viande. Oubliez les livres d’histoires où le débarquement aurait soi disant été une réussite écrasante, car s’il l’a bien été au regard de l’humanité, au regard de l’humain ce fût une vraie boucherie et le film de Spielberg est là pour nous le rappeler ainsi que pour nous fournir un exemple précis de ce qu’on appel en langage guerrier « la chair à canon ».

Malheureusement après cette surprenante (ce fut tout de même le réalisateur d’E.T.) et choquante entrée en matière, Spielberg s’embourbe douillettement dans sa niaiserie et son patriotisme premier degrés habituel. Tout cela est d’autant plus ennuyeux qu’ici le co-directeur de Dreamworks tenait la base d’une violente critique du pouvoir militaire qui sévissait à l’époque de la Seconde Guerre. D’ailleurs pour quelqu’un de lucide, la critique est bien présente même si elle l’est de manière involontaire (demandez vous à la dernière séquence si le vieux a bien réussie sa vie). A part cela, on peut trouver choquant la vision qu’a Spielberg des allemands, ceux ci étant tous sans exceptions représentés comme des salauds intégraux (tous les allemands n’étaient pas des S.S. et ne prenaient pas un malin plaisir a tuer -voir la scène insoutenable du couteau). Beaucoup d’allemands n’apprécieront pas ce « détail ».

Malheureusement les guerres ne sont pas aussi manichéenne que Spielberg le voudrait. Dommage donc. Néanmoins, ça reste moins révoltant que dans La Liste de Schindler, car c’est bien d’un film de guerre dont il s’agit. Rien de plus. Et les 2h50 passent très vite. Que demande le peuple ? Davantage j’espère.