Il fallait à priori se méfier du projet, même si on connaît la qualité générale -plutôt élevée- du travail fourni par Thurston Moore (Sonic Youth). Comme pour les albums de remixes qui fourmillent depuis quelques temps sans toujours apporter leur lot de bonnes surprises, le projet RootThurston Moore a mis sur bandes des pièces de guitare courtes, 30 seconde à 1 minute, puis a envoyé le tout à de fort nombreux musiciens et remixeurs et leur donnant pour consigne de faire ce qu’il voulaient, c’est-à-dire d’évoluer le plus librement possible- pouvait tout à fait courir à la catastrophe. Bien heureusement, ce n’est pas le cas. Pourquoi ? D’abord, parce que le concept, s’il était risqué, était intéressant : tant qu’à retravailler un morceau, autant remonter en amont pour n’avoir qu’une trame, une ébauche de luxe, ce qui est bien moins contraignant qu’un morceau « produit fini ». Ensuite, parce que Thurston Moore a contacté des artistes d’horizons fort différents (Derek Bailey, Alec Empire, Blur, Third Eye Foundation, Merzbow, Bruce Gilbert, Stereolab…), évitant par là le piège du label « remixeur ». Enfin, tout simplement parce que le résultat est probant, avec des succès attendus (Mogwai ou Stock, Hausen & Walkman), mais aussi et surtout quelques réussites éclatantes et moins courues d’avance (Blur, VVM, The Mellowtrons ou Echo Park). Bien sûr, cela ne séduira pas tous les fans de Sonic Youth ou même de Thurston Moore, mais ceux qui ont l’oreille quelque peu aventureuse devraient trouver dans ce Root de beaux plaisirs. Notez de plus que la sortie de ce disque hautement conceptuelle s’est accompagnée d’une exposition répondant à la musique par son pendant plastique, qui réunit nombre d’artistes underground ou reconnus, dont David Bowie. Ce même Bowie ayant fait savoir qu’il participerait bien -par une contribution musicale cette fois- à une suite, de même que les Beastie Boys ou Yoko Ono. Ca promet…