Matt Elliott fait dans le remix. Finalement, rien d’étonnant au vu de ses dernières productions musicales à ce que le techno-prolo de Bristol s’engage dans un album entier de remix. Courtisé par les plus grands noms du rock indé et du post-rock gentillet, Third Eye Foundation, en formation DJ, a souvent préféré les ambiances électroniques d’une table de (re)mixage que la furia contenue d’un concert en groupe. Car si certains ont crié au prodige quand il sortait coup sur coup en France Little lost soul et You guys kill me, le seul véritable bon souvenir des essais électroniques de Matt Elliott remontait à ses premiers efforts, dans Ghost notamment, pierre fondatrice du système Third Eye : du heavenly voice passé à la moulinette de l’electronic hip’n’hype. Convaincant dans un premier temps, agaçant pour la suite.

Sur ce nouvel album, Elliott reprend ses bonnes vieilles recettes et les décline au monde du remix. Premier bon point, son approche donne dans le pédagogique, laissant l’oreille de l’auditeur reconnaître les titres originaux avant de les déconstruire lui même. La base musicale, elle, est du plus classique, balayant en huit morceaux le ghota du (post) rock branché actuel. Tarwater et Yann Tiersen y côtoient virtuellement Blonde Redhead et Chris Morris dans la plus grande cohérence. Et c’est peut-être cette cohésion trop parfaite qui agace à la longue : si la musique de Third Eye Foundation est on ne peut plus plaisante à l’oreille, elle ne dénote que trop rarement d’un grain de folie, d’inventivité même. Les sons se complaisent entre eux, les drônes lancinants s’enchaînent et se ressemblent, bref peu de nouveauté sous le soleil gentiment métal de l’univers de Matt Elliott.

Une des forces (et faiblesses) de ce I poopoo on your juju est l’intégration totale des options musicales des artistes remixés, aboutissant à un album en directe continuité avec les précédents essais du musicien. En bon Nana Mouskouri de l’electronica, il enchaîne les tubes de l’underground en puissance, alternant filets suraigüs et vocaux fantômatiques, rythmiques drum’n bass un peu dépassées et scintillements électroniques old school. Reste derrière cette débauche minimaliste de romantisme synthétique quelques spores libres de tout attachement, rappelant à nos esprits les ritournelles incontournables de Tarwater ou Urchin.