Matthew Bower continue sa quête personnelle du drone électrique ultime. Depuis l’aventure Skullflower, puis celle de Total, il continue à enregistrer une pléthore de disques qui sortent généralement dans l’indifférence la plus totale sur des labels amis (VHF notamment, qui a sorti l’année dernière le monstrueux double album Delicate autobahn under construction) ou sur son propre label, Rural Electrification Project. Ce Found star sound est d’ailleurs accompagné d’une sortie en CD-R d’un vieil enregistrement de Total datant de 1996, Solid objects cast at Goblins (d’après une phrase de Joyce) et comprenant trois titres, dont un de 45 minutes (!). Inlassablement donc, il continue à sortir des disques, enregistrés en pleine campagne anglaise, pleins de morceaux généralement interminables, basés sur un psychédélisme lo-fi qui peut paraître fascinant ou totalement insupportable, selon l’humeur.

Ce Found star sound n’échappe pas à la règle (bien que les morceaux soient plus courts que d’habitude). Bower y superpose guitares bourdonnantes, orgues, violon, voix lointaines, flûtes, clochettes et mini-percussions qui évoquent comme souvent un chaman à moitié clochard habitant en banlieue en pleine cérémonie d’invocation d’êtres mystérieux et sales. A mi-chemin entre Moondog et Gaston Chaissac, entre l’impro d’avant-garde et l’art brut, le tout mâtiné d’un mysticisme étrange et intemporel, la musique de Sunroof est pleine d’une poésie sauvage et autiste. A cet égard, le titre du disque, particulièrement beau (« son d’étoile trouvé ») évoque bien l’univers de Bower. Douze titres sur ce nouvel opus, à la qualité sonore inégale (si on peut parler de qualité sonore), évidemment mixés à la hache (un titre s’arrête quand il appuie sur la touche « stop ») mais généralement très réussis. Sweet pacification rappelle ainsi une répétition du Velvet Underground sans Moe Tucker, et le génial Pink werewolf (le loup-garou rose !) fait s’entrechoquer des guitares maltraitées sur une boucle d’orgue acide distordue. Sunroof aurait été plus à l’aise à San Francisco en 1967. Aujourd’hui, si écouter cette musique relève parfois de l’épreuve, l’apprivoiser ouvre la porte aux plaisirs subtils de l’hypnose sonore bruyante. Les dix minutes de Pink stream 2 ou les treize minutes de Betsy braves the billows semblent réellement provenir d’ailleurs, d’un endroit non identifié auquel elles peuvent conduire tout auditeur suffisamment disposé à y aller faire un tour…

Pas de liner notes sur ce disque, mais on suppose que Bower est accompagné comme d’habitude par John Godbert (ex-Ramleh, autrement dit membre de la « famille ») et Neil Campbell (Vibracathedral Orchestra), que l’on a retrouvés sur la récente compilation Scenes from ringing isle, sorti sur Giardia. Pénétrer dans l’univers de Sunroof n’est pas facile. C’est un peu comme être fan de Pierre Boaistuau (1517-1566). Mais si vous êtes prêts à tenter l’expérience légèrement hallucinatoire qu’est l’écoute de cette musique, alors Found star sound sera une bonne introduction.