Elles reviennent. Et elles sont moins mécontentes que par le passé. Si leurs trois albums précédents sonnaient comme des coups de gueule à la façon de ceux de leurs collègues Riot Grrls, ce Hot rock annonce un renouveau. Comme une sorte d’accalmie. Peut-être le choix de leur producteur, Roger Moutenot (Yo La Tengo), y est-il pour quelque chose. A moins que les cendres de la révolte post-adolescente de Corin Tucker et Carrie Brownstein, noyau dur du groupe, se soient presque refroidies… Les fans de la première heure, amoureux des brutalités grunge sans concession des demoiselles, risquent d’être surpris devant ces treize morceaux mélodieux et harmonieux, dont une moitié a été testée lors d’une tournée à travers les USA. Tant pis pour les intégristes qui refuseront de suivre. Ils rateront une belle collection de chansons influencées par les Throwing Muses, truffées d’harmonies vocales inextricables, de riffs inspirés et de roulements de batterie signés par l’excellente Janet Weiss.
Ainsi, sur Hot rock, Tucker et Brownstein, ex-amantes, se donnent la réplique pour un duo vibrant d’émotion mal contenue, dialogue de sourd où chacun parle au lieu d’écouter l’autre. On peut aussi apprécier l’ironie de Banned from the end of the world où les Américaines rigolent de l’angoisse de fin du millénaire qui a saisi leurs compatriotes à la gorge. Enfin, The Size of our love, ballade tremblée et mal assurée, quelque peu dissonante, serre le cœur et se détache du reste. Cependant, si The Hot rock a des accents plus sophistiqués, plus doux et tendres que ses prédécesseurs, il demeure loin de la mièvrerie et de l’eau de rose qui délave trop les efforts musicaux des artistes américaines ces jours-ci. Les Sleater Kinney sont encore bien trop jubilatoires, sales gosses et révoltées pour adhérer à la clique des gentilles de la Lilith Fair.