Il n’est plus aujourd’hui question de contester la place qu’occupe l’accordéoniste niçois Richard Galliano parmi les plus grands jazzmen français. Galliano joue du jazz (jouer du jazz, pas jouer jazz : nuance) sur un instrument assez peu courant avec une réelle sensibilité, une virtuosité qu’on peut vérifier à chacun de ses disques et, bien souvent, un remarquable talent de compositeur. Toutefois, à l’entendre en leader comme en sideman, on ne peut s’empêcher d’éprouver une sensation de trop-plein, de débordement mélodique et sonore -jamais gratuit, mais jamais vraiment sobre. Modération, Galliano connaît pas. French touch, soyons clair, est un très bel album : thèmes superbes (Sanguine), rythmiques irréprochables (le couple Jenny-Clark/Humair fonctionne à merveille – commencez l’écoute par Tacot blues, le dernier morceau, du concentré d’idées rythmiques), Portal retrouvé (virevoltant au soprano)… Et à chaque morceau, on se répète qu’il aurait suffi de quelques notes de moins, d’un peu d’effacement et de tempérament, qu’on frôlerait alors le chef-d’œuvre. Il ne manquera pas d’arriver un jour ou l’autre, quand Galliano n’utilisera plus seulement la mine de son crayon mais aussi la gomme qui est au bout.

1) Bébé (Hermeto Pascoal) – 2) A french touch (Richard Galliano) – 3) J.F. (Richard Galliano) – 4) Caruso (Lucio Dalla) – 5) Heavy tango (Richard Galliano) – 6) Sanguine (Richard Galliano) – 7) Augusta (Richard Galliano) – 8) You must believe in spring (Michel Legrand) – 9) Passarinho (Richard Galliano) – 10) Sanfona (Richard Galliano) – 11) L’envers du décor (Richard Galliano) – 12) Tacot blues (Richard Galliano / Daniel Humair)

Richard Galliano (acc), Jean-François Jenny-Clark (b 2, 3, 4, 6, 7, 11, 12), Daniel Humair (dm 2, 3, 4, 7, 9, 11, 12), Michel Portal (ss 3), André Ceccarelli (dm 1, 5, 8, 10), Rémi Vignolo (b 1, 5, 8, 10), Jean-Marie Ecay (g 1, 10). Enregistré les 8, 9, 10 mai 1998 et 8 juin 1998 au studio Ferber, Paris.