José Cura (ténor). Philharmonia orchestra, Placido Domingo

La belle rumeur qui précédait le baptême au disque de celui que d’aucuns nous annoncent comme LE nouveau ténor ! De fait, à tout juste 35 ans, Cura peut se flatter d’une carrière scénique exceptionnelle : en moins de trois ans, l’Argentin a enchaîné dans les théâtres les plus prestigieux rien moins que Stiffelio, Cavaradossi, Ismaele de Nabucco, Samson, Pollione dans Norma, Don José, j’en passe et le plus prestigieux -et périlleux !- d’entre tous, un Otello triomphal dirigé par Abbado en mai dernier. C’est dire qu’on attendait ce premier récital avec une excitation extrême -le parrainage du maestro Domingo laissant également présager du meilleur…

Hélas, trois fois hélas… ce best of the best of Puccini (à en dégoûter les plus épris, dont nous sommes) s’avère très en deçà de toutes nos espérances. A l’extrême opposé du superbe et très sélectif programme Fleming/Solti, Cura et Domingo nous « offrent » une anthologie absolument contre-productive pour le jeune ténor, incapable de caractériser aucun des héros pucciniens proposés ici. Confondant -mais est-ce bien sa faute, quand on sait que tout cela a été enregistré en une petite semaine…- Mario et Calaf, Des Grieux et Pinkerton, et pleurant à n’en pouvoir mais, spécialement dans l’air des Villi (écoutez ce qu’en fait, lui, Alagna, en complément de son intégrale récente de La rondine, la comparaison est douloureuse…).

Mais le plus grave est ailleurs. Où se cache donc le fabuleux ténor que l’on nous annonçait ? D’accord, la voix est virile, les aigus plutôt vaillants (mais pas plus que chez d’autres), d’accord aussi, Cura réussit quelques belles choses ça et là (superbe entrée dans « E lucevan… »), mais au prix de quelles difficultés techniques, de quels arrangements avec le texte ! Le plus inquiétant étant ce médium poussé à l’extrême, laid et serré, qu’on penserait presque, à l’aveugle, être plutôt celui d’un chanteur en fin de parcours ! Et Dieu sait, pourtant, que la baguette de son mentor ne le malmène guère…

José Cura ne mérite donc sûrement ni l’excès d’indignité ni les éloges transcendantes auxquels se sont livrés récemment quelques fameux confrères. Pour notre part, très déçu par ce faux-départ, on attend sereinement la suite (scène et intégrales) pour nous faire une opinion définitive. Au bénéfice du doute…