Brian Molko en a marre et il le dit ! Marre de la presse, de la télévision, et même de monter sur scène. Le leader de Placebo cherche le remède…

C’est avec une certaine appréhension qu’on attendait le concert de Placebo, programmé pour la deuxième année consécutive à la Route du Rock. En 96, ils avaient conquis le public en reproduisant quelques titres de leur premier album, tout juste sorti et encore largement inconnu ; en 97, la donne a changé : tête d’affiche, succès européen à la suite de nombreux concerts en première partie d’artistes aussi prestigieux que Bowie ou Iggy Pop, Placebo s’est imposé comme une alternative très crédible à la scène britpop. Pourtant, on s’attendait à être déçu : le chanteur Brian Molko se montrait, quelques minutes avant de monter sur scène, rempli de doutes et de lassitude. Et en apparaissant comme un des musiciens les plus sincères, les plus meurtris que nous avons eu l’occasion d’approcher en trois jours, il ne jouait manifestement pas le rôle du rocker tourmenté.

Brian Molko en a marre : marre d’être perpétuellement interrogé sur son androgynie, marre de ressasser les mêmes morceaux sur scène (et ce terrible aveu: « avec la télé et la radio, on n’a pas le droit de prendre des risques »), marre de se projeter dans l’avenir. Et quand on le surprend à se rêver plus âgé, c’est le modèle Bowie qui s’impose: « un survivant, un caméléon, un opportuniste qui assure… »

On prévoyait donc un concert mollasson et tristounet, une formalité vite expédiée. C’était oublier que la musique de Placebo était faite de dégoût, de refus de la vie quotidienne, de fuite en avant, musique chaotique et rageuse où pourtant rien n’est laissé au hasard. Du coup, l’humeur sombre du trio a encore renforcé l’aspect colérique de ces morceaux dépressifs qui ont trouvé toute leur dimension sur Evil Dildo, instrumental directement inspiré des méticuleux délires noisy de Sonic Youth -une des premières influences revendiquées par le groupe. Si c’était encore à démontrer, ce set vertigineux aura définitivement prouvé aux sceptiques que Placebo n’est pas un groupe gentillet et inoffensif. Il faudra compter avec eux à l’avenir, et surtout avec leur deuxième album qu’on souhaite encore plus audacieux et où diverses influences auront sans doute voix au chapitre : « Quand je suis à la maison, je suis fatigué des guitares saturées, j’écoute principalement de la techno, de la musique électronique, et ça se ressentira certainement », confie Brian Molko.