Œuvre de commande ou de circonstance, PS I love you décevra sans doute tous les fans hardcore de Michael Depredo aka Kid 606. Il est vrai que, habitués à ses disques précédents, cocktails Molotov soniques, lancés insolemment à la gueule du monde par ce « US electronica wunderkid » (19 ans d’âge civil à peine), on se retrouve quelque peu pantois et confondu par ce nouvel opus, tout en finesse et apaisement. La pochette (une belle réussite de la nouvelle ligne graphique de Mille Plateaux, méritant mention spéciale et félicitations à part) en annonce déjà la couleur. Alors, petit, en route vers la sérénité ? Limpidité, apesanteur… peace & love ? Finis les ondes de choc, matraquages de neurones, inouïs supplices d’ouïe administrés à coups de BPM effrénés, breakbeats spasmodiques, rafales de bruit, saturations, larsens, lambeaux de sons torturés, triturés et glissandi de glitches en compote ? Du lard ou du cochon ? Calme raplapla ou calme avant la tempête ? Compromis ou perversité de énième degré ? L’a-t-il fait pour plaire à Achim Szczepanski (boss et concept-gourou de Mille Plateaux) ou s’est-il réellement assagi ? Autre hypothèse : ayant bien assimilé quelques tics stylistiques et « procédés » piochés dans le catalogue du label -on peut discerner au fil des morceaux des clins d’œil et emprunts à Oval, Terre Thaemlitz, Sturm, Gas-, notre digi-punk « assagi » agit, peut-être, en post-situationniste pince-sans-rire et post-post moderne, essayant de « faire du Mille Plateaux » dans une démarche de réappropriation ironique… D’un autre côté, le choix d’un label peut aussi constituer une tentative de recontextualisation de ce que l’on fait habituellement… Après tout, qu’importe, tant le plaisir procuré par le disque se passe de ce genre de spéculations théoriques. De plus, vus les connotations « intellectronica » froide et « conceptuelle » ou d’éventuels a priori suscités par sa publication chez Mille Plateaux, on peut être également surpris par son aspect presque… pop.
PS I love you (tiens, un clin d’œil aux Beatles…) est donc un disque pop (en tout cas plus pop que Pop de Mike Ink/Gas…), presque lyrique, comprenant d’exquises esquisses mélodiques et passages ambient éthérés, impensables sur ses productions antérieures. Amateurs de bruit et de fureur, passez votre chemin ou reportez-vous à ses autres brûlots de disques publiés chez Vinyl Communication, Tigerbeat6 ou Ipecac. Cependant, bonne (?) nouvelle : pour ne pas vous laisser complètement tomber et pour rester fidèle à son image de « jeune et rebelle », le Kid, juvénilement incorrigible, intitule le dernier morceau Fuck up everything you can before you plan on slowing down… Désarmant.