Nouvel album de Khan (alias El Turco Loco, Can Oral, 4E, etc.) après ses disques d’electronica sur Mille Plateaux et de nombreuses collaborations avec Dr Walker, Jammin’ Unit, etc. Plus accessible, mais pas moins fin, ce 1-900-get-khan est une grande réussite, qui mélange avec bonheur diverses influences. On commence avec Jet lounge blues, clin d’œil à Jimi Tenor et on enchaîne avec Booker to hooker, dont les nappes planantes et les cloches résonnent dans la tête comme après quelques verres de whisky, le tout sur une pesante rythmique jazz. Body dump est une ballade kraftwerkienne en diable, à ceci près que c’est Julee Cruise qui pousse la chansonnette : calme et charmant. Pollution and misunderstanding a le même pouvoir d’arrêter le temps que les meilleurs morceaux exotica ! Sur Nowhere, Julee revient, mais là c’est plutôt raté : malgré les bruits curieux qui parsèment le morceau, la voix gêne plus qu’elle n’enchante. U do what U did est un bijou d’inquiétude électronique sur nappes glaciales et rythmique à la Young Marble Giants.

Puis Khan met à nu sa passion pour la techno : seul morceau réellement hypnotique du disque, Salty waltz reste dans la droite lignée d’une techno minimaliste à la Plastikman/Chain Reaction. Juste après, le guilleret Time’s a vice mélange tranquillement l’électro-acoustique au funk tandis que Sprinkler suite nous replonge dans un univers sombre de signaux d’appel au secours de droïdes endommagés. Broken eglish, très krautrock, est assez génial et rappelle évidemment d’autres musiciens allemands plus vieux qui portaient presque le même nom que lui : Can. Pour terminer, Foxy baby est un petit chef-d’œuvre qui mélange subtilement batterie réelle et électronique, entre Pram et Tortoise, un condensé idéal de post-rock mélodique et magique (et sans rapport avec Jimi Hendrix).

Enfin, The 12th commandment ajoute quelques notes mélancoliques à une opératrice de téléphone porno : ça fonctionne à merveille, comme aux meilleures heures de Lydia Lunch ! Autant que Luke Vibert, Terre Thaemlitz et Aphex Twin avant lui, Khan s’amuse à mettre en relation sexe et musique électronique (habituellement si opposés), compositions délicates et porno au quotidien, avec beaucoup d’humour et un poil (?) de provocation. Sur la pochette, composée de flyers d’annonces érotiques pour mecs (ça change des habituelles pochettes abstraites), on le voit en slip et Rayban : c’est aussi vêtu de la sorte qu’on peut le voir sur scène, derrière ses machines et autres synthétiseurs… Pour une conversation chaude, un seul n° : 1-900-get khan !