C’est à partir du groupe Oslo 13 que Jon Balke a constitué, au début des années quatre-vingt-dix, ce Magnetic North Orchestra aujourd’hui ramené au format du septet (l’ensemble original mêlait percussions, quatuor à cordes et sextet jazz) ; du principe d’exploration des zones communes au jazz et aux musiques contemporaines et extra-occidentales qui guidait les premiers de ses travaux, il a évolué vers celui d’une musique de chambre plus concentrée, dans ses sources aussi bien que dans son orchestration. L’arrivée voici huit ans d’un deuxième trompettiste, Arve Henriksen (connu pour ses collaborations avec Trygve Seim et Christian Wallumrod et, aussi, sa participation au groupe électro Supersilent), a modifié du tout au tout la configuration sonore et spatiale d’un groupe attaché au travail des textures et des couleurs (Kyanos signifie « bleu » en grec), imposant la définition d’un nouveau rapport des cuivres entre eux (Per Jorgensen à la trompette, Morten Halle au saxophone) et avec la section des cordes. Celle-ci s’articule aujourd’hui autour du contrebassiste pilier Anders Jormin et de l’étonnant violoncelliste Svante Henryson, instrumentiste électrique, membre à la fois du philarmonique d’Oslo et du groupe metal du guitar hero Yngwie Malmsteen (!).

A la tête de cette formation réduite, Jon Balke explique vouloir « explorer la dynamique entre des formes mélodiques très claires, presque sculpurales, opposées à des panoramas sonores purement formels » ; un travail sur le fil entre lignes concrètes et volumes abstraits que favorisent des partitions délibérément simples, presque décharnées, propres à constituer les tremplins d’improvisations d’une grande liberté. L’écriture très contemporaine du pianiste norvégien est ainsi mise en valeur dans un contexte aussi proche de la tradition jazz scandinave que de celle des musiques improvisées européennes (notamment dans l’utilisation volontiers bruitiste des instruments) ; de légers arrières-plans électroniques, mêlés à la forte réverbération propre à l’esthétique du label, participent de la réussite d’un travail de chaque instant sur l’espace et l’ambiance. Une musique à la fois ample et intense (malgré l’extrême sobriété de chaque musicien et une tonalité générale souvent minimaliste), magnifiée par les percussions du formidable batteur qu’est Audun Kleive.