La musique sacrée intéresse peu de compositeurs aujourd’hui. Olivier Messiaen, et lui seul, a su renouveler au premier plan le répertoire des organistes, en fournissant pendant 40 ans, du haut de sa tribune de l’église de la Trinité, messes et chorals. Dans son sillon, Jean Giroud, son contemporain presque exact (1910-1997), laisse une œuvre qui n’a pas la diversité, la force et l’originalité de l’auteur de La Messe de Pentecôte. Elle constitue cependant un témoignage intéressant de l’influence de Messiaen sur les autres organistes français. Totalement habitée par sa foi catholique, son œuvre est honnêtement écrite, aimablement construite, sorte d’héritage du plain-chant et de la polyphonie médiévale. Les Images pour le chemin de croix de 1944, pour récitant et orgue seul, dont il s’agit ici du premier enregistrement, est à l’image de l’œuvre de Paul Claudel : grande (boursouflée pour les détracteurs), totalement investie.
A écouter la voix de Laurent Terzieff, on peut y croire. L’homme est fidèle à sa passion de la poésie, au christianisme. Accrocheur. Au programme, « Jésus condamné à mort, chargé sur la croix, qui rencontre sa mère, qui tombe une fois, deux fois, trois fois, dépouillé de ses vêtements, qui meurt (ouf !)… ». Le texte de Claudel est précis au possible, il sonne comme un anti-Artaud. C’est le lyrisme de Monsieur l’Ambassadeur. A vous d’apprécier.
La musique de Giroud en contre point, écrite en étroite collaboration avec Claudel, est une grande symphonie pour orgue en 14 mouvements. Elle tient la route, mais se contente de créer un (vague) climat autour de l’immense acteur. Philippe Brandeis, du pupitre de l’orgue du maître au Grand-Bornand, rend justice à cette musique difficile, maîtrisée mais tout de même un peu limitée. Pas de quoi nous envoyer au paradis quand même.