Après un premier album paru sur Lithium et intitulé L’Arrière monde, qui se révéla au fil des écoutes insidieusement toxique, pour ses mélodies et ses textes doucement abstraits (on gardera longtemps en tête le mini-hit La Machine), on attendait beaucoup des français de Holden. D’autant plus qu’était annoncé le divin Uwe Schmidt à la production. Et effectivement, l’inventeur de Senor Coconut, plus porté pourtant sur l’electronica décalée que sur la pop intimiste, a su insuffler une dynamique tubesque à cet album, par de petits détails de production qui font mouche (reverbs impromptues, mises en boucles, nappes soyeuses).

Ceci, ajouté à une section rythmique sans faille, des arrangements variés, et surtout, la texture mémorable d’une vieille guitare électrique, égrenée en suspension par un Mocke adepte de Django Reinhardt, donne un disque foisonnant, naviguant entre jazz fifties, rock expérimental, calypso. Armelle sait aussi poser sa voix délicate, avec une précision légèrement raide, sur des textes énigmatiques. Le seul défaut tiendra peut-être à ces tournures parfois absconses, des associations de mots peu heureuses (« tranquille » ne rimera jamais avec « cafetière électrique »), même si les textes apprennent également à se laisser dévoiler. Peu à peu, leur caractère énigmatique implique l’imaginaire de l’auditeur, et se révèlent doucement poétiques. Un disque à découvrir, donc.

En français, bénéficiant d’une production soignée, Pedrolira devrait réconcilier les amateurs de délicatesse avec une certaine idée de la chanson française, trop cantonnée ces jours-ci aux tristes chansons réalistes ou aux saillies vocales fabiannesques. Avec ses hits C’est plus pareil et Une Fraction de seconde, on devrait avoir prochainement le plaisir d’entendre en radio un versant inexploré de la chanson en français. A suivre.