Ce groupe en activité depuis 1993 est connu pour son psychédélisme sixties et ses textes en gallois. Il nous livre inopinément, avec ce septième album, une manière de chef-d’œuvre pop bucolique. The Blue trees est avant tout un disque accueillant. Le son y est simple et chaleureux. La guitare acoustique y est reine, et bien entourée : violons et orgues, un peu de guitare électrique, une touche de synthétiseur, une autre de piano, chœurs, shakers, un peu de caisse claire aux balais, un peu de basse. Ces instruments sont enregistrés avec une esthétique sonore de la franchise et de la plénitude, qui respecte leur timbre naturel et confère à l’ensemble une certaine fraîcheur.

L’album comprend huit compositions, dont trois instrumentaux. Toutes sans exception témoignent d’une sensibilité mélodique rare. Rien de bien original, mais ce groupe possède un sens profond du mouvement des voix, de la seconde guitare qui tue en arrivant à la bonne mesure, du petit arpège qui fait dodeliner du chef… Et c’est infiniment précieux. Le bonheur du disque tient sans doute au fait que ses excellents thèmes y sont développés avec les moyens nécessaires et suffisants à leur épanouissement. Il suffit d’écouter Lady fair et son final étourdissant de grâce : ce contrepoint de violons et guitares tournoyant sur deux accords (sol et la mineur). The Blue Trees est avant tout un disque où tout sonne juste. Bien sûr, la veine folk pop du disque rappelle de brillants aînés : picking folk à la John Fahey, arpèges mélancoliques à la Nick Drake, pop frêlement électrifiée à la Velvet circa ’69. Et donc, par un détour aussi personnel qu’inattendu, Gorky’s rejoint la paisible clairière où campent aujourd’hui Belle & Sébastien et le Jim O’Rourke d’Eureka.
Ce détour semble confirmer que c’est au nom de la recherche sonore qui démoda le folk que le folk est devenu un aboutissement de la recherche sonore. La pochette du disque imitant l’enveloppe trouée des 78 tours nous indique qu’il s’agit bien d’une démarche consciente de la part des Gorky’s.