Edition Leonard Bernstein (I & II). 26 CD séparés.


Toutes les occasions sont bonnes de fêter Lenny (et quand bien même il n’y en aurait pas…) : Sony saisit donc celle du 80e anniversaire de sa naissance pour nous livrer, d’ici à la fin de l’année, cette anthologie d’une bonne demi-centaine de CD -peu d’inédits en vérité, mais pléthore de géniales rééditions indispensables à quiconque voudra se (re)constituer un fonds Bernstein, chef et compositeur… et qui ne voudrait pas ? Note maximale, donc, pour tous les volumes qu’on vous exhorte à acquérir subséquemment : le reste n’ajoutera rien à la gloire de maître Leonard, et pour tout dire, on aurait préféré ne jamais entendre ou réentendre ce Messie tarasbicoté et hors de propos, ou cette 9e new yorkaise tellement en retrait de celle gravée, à la fin des 70’s, à Vienne.

Tout ce qui vient, en revanche, sera source d’admiration et de jubilation éternelles. On ne vous apprendra rien en écrivant que Bernstein fut le chef mahlérien du siècle : cette Résurrection si longtemps attendue en est la démonstration la plus éclatante, probablement son plus grand enregistrement de Mahler avec ses 4e d’Amsterdam et 9e berlinoise (DG). Symphonie couplée à un Adagietto de la 5e capté lors des funérailles de Bob Kennedy en la cathédrale Saint Patrick de New York : transition ô combien symbolique et idéale vers ce répertoire qu’aucun autre chef ne défendit mieux que lui (sinon un Tilson Thomas, aujourd’hui) -celui de ses contemporains américains, et le sien avant tous les autres ! Un seul disque à acquérir, s’il fallait, serait é-vi-dem-ment ce Bernstein by himself, West side story (ah, Natalie Wood !), On the waterfront (ah, Marlon Brando !) et cette ouverture décapante d’un Candide que quelque régisseur serait bien inspiré de remonter très vite ! Complément idéal de ce volume, celui consacré à Gershwin, dont on ne saurait mieux fêter, aussi, le centenaire de la naissance : a-t-on jamais dirigé avec plus de classe et de naturel la Rhapsody in Blue, et l’Américain à Paris ? Un rien en deçà, enfin, mais néanmoins tout en haut de la (maigre) discographie existante se placent les trois Copland, dont on retiendra surtout une 3e Symphonie ardente et fraternelle -témoignage magnifique de l’extraordinaire ami et complice que fut, tout au long de sa vie, Leonard Bernstein.

On voudrait vous parler, aussi, de ces « Classiques pour enfants » auxquels vous ne serez pas les derniers à succomber : Pierre et le loup, malicieux et piquant, et un Carnaval des animaux haut en couleurs. Ou encore de ces somptueux et ébouriffants Pins de Rome, un choc pour tous ceux qui considèreraient encore Respighi comme un simple pasticheur de (grand) talent. Voilà : en cinq ou six CD, un concentré -si possible !- du génie de Lenny, vivant, bien vivant…

Stéphane Grant