C’est un peu difficile de parler de ce cinquième album de Belle and Sebastian : le groupe nous présente ici la B.O. du film éponyme de Todd Solondz, et quelques nouvelles chansons écrites pendant l’année 2001. Seulement six nouvelles chansons entrecoupées de dialogues extraits du film, qui semblent parfois un peu noyées dans les thèmes instrumentaux composés pour les besoins du réalisateur New-Yorkais.
En fait Storytelling ressemble à une cour de récréation dans laquelle nos Ecossais préférés font des bêtises : les petits thèmes qui ouvrent l’album sont très scolaires, et vite recouverts de plusieurs couches de grosse réverb’. Résultat immédiat : le son sirupeux des violons vous dégouline dans les oreilles et c’ est parfois un peu limite… Sur Storytelling, tout le monde s’exprime, tout le monde chante : Steve le guitariste sur Wandering alone, Isobel (qui vient d’ ailleurs de quitter le navire au cours d’une tournée américaine) sur le trop court Storytelling… On surprend aussi le groupe à multiplier les clichés (clins d’oeil ?) rock/variété, comme l’orchestration de Big John Shaft, qui rappelle plutôt une vieille chanson de Lenny Kravitz.
Mais malgré ces écarts de conduite, le groupe reste bon élève : les morceaux de la B.O. sonnent comme une bande originale de film (on reconnaît vraiment souvent l’ambiance du Pat Garett and Billy the Kid de Dylan, influence officielle revendiquée par le groupe pour le travail présenté) et la plupart des morceaux chantés ne dénoteraient pas sur certains EP’s de la discographie du groupe (3, 6, 9 seconds of light, Legal man, I’ m waking up to us). Les paroles font souvent sourire : « I don’ t want to play football, I don’ t understand the rules of the game (….), I’ d rather play a different sort of game, Sugar, the girls are just as good as boys at playing ». Belle and Sebastian semblent maintenant très loin de l’époque de If You’ re feeling sinister, où Stuart Murdoch dirigeait avec sa belle voix androgyne tous les titres de l’album. Storytelling est le disque d’un groupe qui s’amuse et pas celui d’un seul et unique songwriter épaulé par sa bande de copains.
Bonne B.O. donc, mais certainement pas le meilleur album du groupe : pas celui que l’on prêtera à un ami qui souhaite découvrir Belle and Sebastian, mais plutôt le nouvel album d’un groupe qu’on adore, qui viendra s’ajouter logiquement à la discographie complète que l’on possède déjà (les vrais fans pourront par ailleurs aussi écouter The Reindeer Section –Son of evil reindeer, album d’un collectif de la scène de Glasgow avec des membres de Belle and Sebastian, Teenage Fan Club, Arab Strap…). Et puis de toute façon, tenter de démonter Belle and Sebastian, c’est pisser dans un violon (violoncelle en l’occurrence) : ce groupe reste celui qu’on aime, qu’on respecte, qu’on écoute pour certains tous les jours. On attendra donc sagement le prochain EP qui mettra tout le monde d’accord.