L’espionnage est à la mode, on dirait: après Ian McEwan (Opération Sweet Tooth) et en attendant le retour de James Bond (par William Boyd), c’est Jonathan Coe qui s’y colle avec Expo 58, une sorte de « Bruxelles, nid d’espions » dans le décor pittoresque de l’exposition universelle de Bruxelles, avec son célèbre Atomium. Le pitch : Thomas, fonctionnaire pâlichon, débarque de Londres pour superviser le fonctionnement d’un pub typique qui jouxte le pavillon britannique. Il a laissé femme et enfant dans leur banlieue, en s’inquiétant des effets d’une si longue absence (6 mois) sur son couple. D’autant que les petites hôtesses flamandes ne sont pas pour lui déplaire. Par ailleurs, il faut aussi compter sur les manœuvres que se livrent les agents secrets de l’Est et de l’Ouest, avec coups fourrés, intimidations et écoutes téléphoniques des Américains… Récit d’espionnage amusant + amourette, en somme, le tout dans un décor pittoresque comme les aime Coe (cf. sa reconstitution de l’Angleterre 70’s dans Bienvenue au club) : rien de spectaculairement neuf mais la machine fonctionne à merveille, avec le célèbre ton du romancier anglais, mélange de facilité décontractée, de ficelles impeccables (surprises en fin de chapitres, révélations, etc.), d’humour et de mélancolie. En arrière-plan, il développe tranquillement une réflexion sur cette époque-charnière de la guerre froide et des années 1950, quand l’Occident des Trente Glorieuses se rêve un avenir fantastique, plein de nutriments artificiels, de robots domestiques et de fission atomique. Du travail de pro, donc, et un roman attachant qu’on n’hésitera pas à placer, malgré (ou peut-être à cause de) ses dimensions plus modestes que le diptyque du Cercle fermé, au plus haut de la bibliographie impeccable du romancier anglais.