Quand le jeu vidéo n’invente pas, il recycle. Il compense son manque d’invention par un savant mélange des genres en faisant se côtoyer les meilleurs idées des uns et des autres dans un tout étonnamment homogène. C’est en tout cas de cette manière que le premier opus de la saga Denpa Men a modestement surpris son monde. En partant d’une idée-méta amusante (bien qu’accessoire) – les denpa men se trouve dans les ondes wifi où on doit les capturer grâce à la caméra de la 3DS – le jeu, sous l’aspect d’un petit JRPG classique, parvenait à combiner des caractéristiques propres à des jeux aussi atypiques que Pokemon, Pikmin, Zelda, Final Fantasy ou même Animal Crossing. Entre explorations de donjons, combats tactiques au tour par tour et customisation de petits gnomes kawaï, un certains plaisir addictif se faisait sentir : celui caractéristique du petit jeu pas prétentieux et plein d’idées qui singe gentiment les gros hits sans être dupe et croire pour autant qu’il en est un.

Un volet supplémentaire plus tard, voilà que débarque The Denpa Men 3 : rise of Digitoll, qui se présente comme un prequel des deux jeux précédents. Or, qui dit prequel, dit grand récit mythologique. The Denpa Men serait-il une grenouille qui veut se faire aussi grosse que le bœuf ? Non, le jeu est très conscient de son histoire-prétexte, il suffit de voir comment cette dernière est expédiée dans les dialogues ou le débit accéléré du Denpa référent qui guide l’aventure, ponctuée d’ailleurs de retournements ironiques qui disent bien son manque de sérieux. Seulement, The Denpa Men, en reprenant tous les composants du RPG, doit bien aller jusqu’au bout de sa logique. Il est notoire que les grands JRPG à l’ancienne, plus que pour leur gameplay (assez rebutant pour les néophytes), ont conquis les joueurs par leur façon de présenter au compte goutte un univers dont on devinait la richesse et la profondeur exponentielle au fur et à mesure qu’on le pénétrait. Plus leur mythologie se dévoilait, plus le joueur devenait indubitablement attaché à ce monde pour lequel il était prêt à surmonter un système de jeu pas toujours avenant. C’est pourquoi ces jeux figurent parmi ceux qui ont propulsé les gamers le plus loin affectivement et émotionnellement.

The Denpa Men, évidemment, n’a pas les moyens ni l’envergure d’une telle promesse. Rapidement, il est clair que son univers, aussi vaste et varié soit-il, ne suffit pas pour tenir en haleine, qu’il n’offre pas grand chose pour donner envie de l’explorer de bout en bout, qu’il n’est qu’une baudruche. Au-delà de son habile et sympathique réinterprétation de mécaniques empruntées, le jeu ne repose sur rien d’autre que ce fétichisme très japonais qui consiste à bichonner et collectionner des petites créatures croquignolettes. Mais à trop vouloir gonfler artificiellement sa mythologie, la greffe avec sa dimension babiolesque ne prend plus, et révèle finalement ce qui lui fait vraiment défaut : une âme.