Au Royaume des jeux vidéo, le FPS règne en maître. On ne parle même plus des PC -à ce niveau de saturation, c’est hors-concours- mais petit à petit, les consoles semblent elles-aussi souffrir du syndrome « colique frénétique de shoots première personne ». Mais comme le seul avatar potable de cette vidéo-lubie PCiste reste l’insurpassable Halo, on peut sérieusement se demander si la déferlante FPS ou proto-FPS (Enclave, GunValkyrie, Max Payne) est véritablement pertinente. A moins de posséder un clavier/souris USB -ce qui n’est pas forcément le pied quand on joue avachi sur son canapé-, le FPS console se distingue souvent comme un pâle ersatz de son pendant PC… En attendant Halo 2, voire Doom 3, ou des simili-FPS tenant compte d’une maniabilité plus adaptée (le bluffant Metroid prime), il faut donc faire le tri entre ce qui reste dans les limites de l’acceptable et ce qui franchit allègrement les frontières de l’injouable.

Red faction II, donc. Pourquoi celui-là ? Ca n’est ni le meilleur du moment –TimeSplitters 2 sur les trois supports est moins linéaire et son mode multi est nettement plus convaincant-, ni le pire –Die Hard vendetta, une daube comme on n’en fait plus. Mais c’est celui qui nous a le plus accroché. De par son esthétique d’abord, une sorte de steampunk-soviet dans lequel il faudrait casser du coco futuriste. Typos slaves, couleurs ocres-rouges, pan-urbanisme totalitaire, personnages hyper-body-buildés à la limite du backroom, on nage en plein rétro-futurisme, un style généralement plus usité par les game-designers nippons. De ce point de vue-là, Red faction II détonne, d’autant que la réalisation est particulièrement efficace, à peine en deçà d’un Halo ou d’un Medal of honor.

Mais au-delà de l’aspect purement graphique, Red faction II a le mérite de réussir là où son prédécesseur s’était limite planté. Rappelez-vous la hype autour du Geomod, système soit-disant révolutionnaire qui permettait de détruire certains éléments du décor… Un pétard mouillé dispensable qui masquait difficilement la médiocrité du soft. Qu’on se rassure, le Geomod a été conservé dans ce second opus. Même si, une fois de plus, son utilité est discutable. En effet, tout n’est pas forcément destructible, ce qui peut parfois donner lieu à des situations assez paradoxales… Pourquoi peut-on saccager un mur en béton et pas un misérable petit grillage ? Tout simplement parce que Red faction II est un FPS scripté. Il suffit de se déplacer d’un checkpoint A à un checkpoint B, la voie à emprunter étant la plupart du temps unique et linéaire. Ici, pas d’exploration à la Halo, ce qui n’empêche pas le joueur de tourner parfois en rond, le chemin à suivre ou la portion de décor à détruire n’étant pas toujours évidents à repérer. L’avantage d’une telle architecture, c’est que ça nous évite la frustration du « die-and-retry », les checkpoints étant suffisamment rapprochés. L’inconvénient, c’est que c’est particulièrement bourrin.

Ne pas s’attendre à des situations réclamant une dose minimum de stratégie guerrière. Ne pas espérer d’ennemis à l’intelligence surdéveloppée. Ils sont très cons, mais résistants -au-delà d’une certaine logique de l’endurance aux balles. Ce qui fait l’intérêt de Red faction II et force une certaine forme de respect, c’est sa variété. Variété des backgrounds, parfois claustrophobiques, parfois extérieurs, mais toujours urbains. Variété des situations, surtout. Entre les phases de shoot classiques, on emprunte divers véhicules (hélicos, tanks, sous-marins) qui permettent de changer notablement le gameplay. Le meilleur du lot étant sans doute la possibilité de diriger un mecha particulièrement destructeur à la démarche lourde et mécanique. Ces petits intermèdes, alliés à un système de sauvegarde complaisant et une direction artistique inhabituelle dans le genre -exception faite des No one lives forever- font oublier que Red faction II n’est qu’un FPS de plus. En attendant que Nintendo et Retro Studios viennent donner un gros coup de pied au cul au genre avec leur Metroid prime, c’est toujours ça de pris.