Avec Puzzle quest, Infinite Interactive accomplissait la gageure de forger, à partir de deux antipodes de gameplay, un alliage astucieux et chronophage : un RPG basé sur les mécanismes casual du puzzle gaming. Soit un univers fantasy, d’inspiration rôliste (PnP proposant quêtes principales et secondaires, expérience progressive…), présentant le scénario le plus banal du genre : défaire une armée de monstres et leur(s) chef(s), reclus au sein d’un donjon immense. Sauf que les combats, au tour par tour, se voient soumis aux règles d’un Tetris en forme de sphérier. Tout coup, sort ou technique s’inflige à condition de réunir en ligne trois couleurs identiques ou plus (dans ce cas, le joueur gagne un tour supplémentaire), chacune étant affilié à une fonction particulière (mana, action, blessure, etc.). Ultima meets Bust-a-move, en très gros.

Réactualisation pour les adeptes, ce deuxième volet n’ébranle aucun arcane originel. Plusieurs options ont même disparu : les sièges de ville ne sont plus, ainsi que la forge, lesquels fournissait pourtant d’excellentes variantes aux méninges. Pour autant, quelques améliorations discrètes relancent l’intérêt. Le joueur se déplace à présent sur une carte en 2D isométrique. Des armes, annexes aux combinaisons classiques et customisables, apportent un dynamisme bienvenu aux duels. Plus important : le casse-tête ne se résume plus à la baston entre héros et bestiaire, mais contamine toutes les actions possibles. Déjouer un mécanisme, piller un butin, apprendre un sort : tout devient prétexte à un shoot de tetris-like supplémentaire.

Objet de fan, donc. Pas au point, pour autant, de se réduire au statut de vulgaire add-on. La dynamique nouvelle des combats fait rapidement oublier la pauvreté conceptuelle du design (graphismes indignes des ressources potentielles de la console) et la répétitivité de la trame principale. Car Puzzle quest passionne toujours autant, par sa subtilité d’équilibre entre hasard et déterminisme ludique. Par son placement aléatoire des pions, l’échiquier des combats semble soumis aux caprices du hasard. Un combat peut prendre trois minutes sans suées, ou une durée épique d’un quart d’heure (durée conséquente pour du casual gaming), à force de malice du sort. Certaines combinaisons heureuses entraînent parfois des réactions en chaînes, absolument imprévisibles pour une intelligence lambda. Ces aléas peuvent rendre le mah-jong rôliste imbitable aux yeux des adeptes de la maîtrise totale. Mais le jeu ne fait que détourner brillamment un des dispositifs qui fit le succès d’un jeu de rôle mythique comme Donjons & dragons : l’allégeance au lancer de dé comme seul arbitre des combats. Le hasard n’est d’ailleurs pas forcément déterminant sur une victoire. Chaque tour est prétexte à un seul coup possible, donc à un choix cornélien de tactique. Preuve ultime : l’ordinateur conseille à chaque phase sa combinaison. L’indice pointe la solution la plus basique, sans garantir une victoire à long terme. Sous ses faux airs d’assistanat, cette aide a néanmoins le mérite d’exister, pour la simple épiphanie qu’il faut parfois choisir le risque du choix personnel à l’automatisme binaire. Contredire une intelligence artificielle pour louvoyer vers la victoire, difficile de trouver mérite plus addictif.