Contrairement à l’engouement général provoqué par la présentation de la console en relief de Nintendo en juillet dernier, la conférence d’Amsterdam s’est révélée chiche en annonces nouvelles et marquantes. Chronique d’un rendez-vous manqué.

Drôle de conférence que celle de Nintendo, un mercredi après midi sous le ciel pluvieux de la banlieue d’Amsterdam. Là où généralement on s’attend à des effets d’annonce en trombe pour célébrer la sortie prochaine d’une nouvelle console, l’assistance a eu droit à du réchauffé sans la moindre surprise sinon la date officielle de la commercialisation de la 3DS en Europe : Le 25 mars 2011. Pour le reste, l’ambiance n’était pas chaleureuse, malgré la faconde joviale de Jonathan Ross, emblématique animateur britannique, devenu hôte de cérémonie pour l’occasion.

Passée la traditionnelle antienne du « nous allons vous donner du plaisir avec une technologie novatrice », digne des meilleures sorties de la sinistre Cammie Dunaway (vice-présidente marketing Nintendo USA de 2007 à 2010) lors des E3, quelques pontes de l’industrie sont venus vanter les mérites de l’étonnante machine qui dévoilait un line-up plus que lacunaire. Des jeux en nombre, c’est acté, mais rien de bien attirant au final. Aucune killer app, point de Mario ou de Zelda, sinon un remake facile de l’épisode 64. Lui aussi sur scène, le PDG Yves Guillemot n’était pas peu fier de la participation d’Ubisoft, avec pourtant un catalogue composé des licences habituelles : Rayman, Splinter cell, Asphalt, Ghost recon… La caution Nintendo se veut-être Kid Icarus, licence que peu de personnes a en souvenir, le dernier opus étant sorti sur Gameboy en 1991. Toutefois, on pouvait compter sur la bonhomie de Yoshinori Ono (producteur de Super street fighter IV), qui de sa bonne humeur caractéristique, et tout en vantant les qualités du mode Street pass (on y revient), vannait gentiment Nintendo pour son invitation à l’avant première du Virtual boy 2. Trop lol.

A l’instar d’un grand mezzé, les jeux annoncés étaient jouables sur de courtes démos permettant de se rendre compte d’une véritable prouesse : la 3D n’a aucunement besoin de lunettes pour être observée. Pari gagné d’un point de vue high-tech, mais qu’en est-il au niveau ludique ? On s’accordera à dire que si l’effet est plutôt saisissant, difficile de trouver une réelle valeur ajoutée. La profondeur est bien entendu au rendez-vous mais quid de l’intérêt ? Ajoutons qu’il faut tenir la console bien en face pour éviter quelques troubles de la vision. La 3DS se joue avec une certaine contrainte. Enfin, du fait que tous les jeux sont étudiés pour le fameux écran en 3D, celui tactile est relégué en second plan et fait office de menus. Un plus cependant avec la présence de fonctionnalités novatrices, tel que le Street pass, donc, qui permet aux DS de communiquer entre elles dès que les propriétaires se croisent dans la rue ou dans le métro. Des fonctions de réalité augmentée autorisent également quelques prochaines idées assez folles.

S’éloignant toujours un peu plus du jeu vidéo, Nintendo a signé quelques partenariats pour la diffusion de programmes 3D. Ainsi, le studio Aardman, connu pour Wallace & Gromit, offrira du contenu visuel comme les chaines de télé Sky et Eurosport. Une véritable révolution pour la firme de Kyoto qui fait de la 3DS sa première plate-forme cross media, là où la marque ne jurait ne faire que du jeu.

Difficile de statuer aujourd’hui sur les atouts définitifs de cette 3DS. Surtout qu’à 250 euros la console, et des jeux en boite flirtant avec les 60 euros, malgré l’attraction du relief sans lunette, le nouveau pari de Nintendo peut apparaître risqué au milieu d’un marché de jeux dématérialisés à petit prix des markets Androïd et Apple. La courte autonomie de trois à cinq heures de la console évoquée par Nintendo paraît elle aussi à contre-courant du marché des appareils mobile de plus en plus autonome…

Concluons par un rapide tour de chauffe des titres les plus marquants :

The Legend of Zelda : Ocarina of time 3D (Nintendo)
Titre déchainant les passions depuis sa sortie, retrouver l’elfe dans ses tribulations en version portable fait son petit effet. On regrettera des graphismes à peine retravaillés malgré un effet de profondeur convaincant qui, toutefois, n’apporte pas grand-chose au gameplay.

Kid Icarus uprising (Nintendo)
Pit sera donc la mascotte Nintendo de la machine. Fini le traditionnel jeu de plate-forme action 2D, Kid Icarus calque les ténors du rail shooting ; de Space harrier à Sin & punishment, dans un délire visuel saisissant. Certainement le jeu 3DS à suivre de près.

Super stret fighter IV 3DS edition (Capcom)
Conversion en tout point supérieure à la version iPhone, la version 3DS propose une nouvelle vue accentuant le dynamisme malgré son manque de pertinence ludique. SSFIV reste assez perturbant en 3D, les barres de vies et d’Ultra étant clairement au premier plan. Si jouer à Street fighter II sur Nec PC Engine GT était la grande classe en 1993, ce sera moins le cas pour l’épisode IV, dix-huit ans plus tard…

Réalité augmentée (Nintendo)
Véritable attraction sur les stands, Face raiders permet la modélisation 3D du visage d’un ami qu’il faudra shooter en déplaçant la 3DS dans l’espace. L’amusant vient du fait que les tirs manqués provoquent des trous dans le décor réel le tout retranscrit à l’écran. AR Games, lui, reprend le concept d’Eye Pet, avec des cartes à disposer devant la caméra, pour voir se matérialiser à l’écran des objets ou créatures. La machine étant gyroscopique, on peut déjà fantasmer sur de nouvelles façons de jouer.

Resident evil : The Mercenaries 3D (Capcom)
Un des jeux les plus saisissants visuellement. L’écran de la 3DS est bien exploité, aidé par des graphismes fins et un rendu 3D que les yeux les plus tolérants sauront apprécier. Hélas, depuis RE4 en 2005, la jouabilité surannée n’a pas évolué d’un iota. Reste la question de l’intérêt au final, vu que le mode « mercenaries » est à la base un bonus défouloir. On préfèrera attendre fin 2011, pour la sortie de Resident evil revelations, titre pour le coup inédit et bien plus attirant.

(Photo : François Bliss de la Boissière)