Le Grand Prix du festival de Gerardmer 2005 est à l’image de ce désormais sinistre événement régional : une mascarade dont l’apparente générosité (on y distribue les effets chocs comme les bretzels à l’occasion de la dernière édition) dissimule un no man’s land cinématographique. Un couple tranquille voit sa vie bouleversée par l’intrusion d’un mystérieux jumeau du père de famille. Le clone, inconnu au bataillon, va faire remonter un lourd passé traumatique… Ce qui fait le plus peur ici, c’est évidemment la nationalité du film (belge) et son casting de cour de récré : Benoît Magimel x 2, Natacha Régnier et Olivier Gourmet. Acteurs remarquables, qui s’en sortent d’ailleurs assez bien, mais qui liquident évidemment tout le potentiel d’étrangeté du film avant même qu’il ait commencé.

Pareille daube n’est évidemment pas déplaisante, tant sa générosité la fait irrémédiablement virer du côté de la farce. Les effets spéciaux sont truculents, usant de laborieux champs contre champs entre les deux Magimel avant d’offrir, incroyable performance, les deux acteurs face à face dans le même cadre. Le film en revient constamment à des procédés ancestraux, comme s’il découvrait fièrement les plus vieillottes ficelles du genre : rebondissements superdélire, décharge d’effets gerbatiques, références arborées à tous les coins de plan, avec mention spéciale pour le De Palma de Soeurs de sang et de Carrie. L’ensemble est si volontaire et généreux qu’il permet au film de ne jamais s’arrêter, de ne jamais flotter, dans une sorte de trop-plein hirsute et coloré qui, à chaque seconde, tombe un niveau plus bas dans le pathétique rococo.

Cette brocante aux effets spéciaux discount bénéficie surtout d’une dernière partie qui dépasse en débilité les pires fleurons des Bee Movies de Canal + ou des productions fantastiques Europacorp (A ton image, récemment) : la vulgarité et l’obscénité de certaines scènes (Magimel en transsexuelle rococo), souvent poisseuses et malsaines, offre à voir, sinon un peu d’étrangeté, l’état d’immaturité et d’inconscience absolument révulsive, absolument aberrante, où est aujourd’hui plongée la production francophone de films fantastiques.